Régulièrement, nous vous proposons de partir à la découverte du formidable patrimoine lorrain. Voyage à travers les époques et les lieux qui font de la Lorraine une véritable destination de plaisir, de rencontre et de rêve.
Première étape de notre fabuleux périple, Nasium dans la Meuse, où nous attendent les vestiges d’une glorieuse et puissante cité gallo-romaine …
Nasium : la cité enfouie des Leuques
Il ne reste pratiquement plus rien de Nasium, plus aucune trace visible de la grande cité des Leuques, peuple gaulois romanisé qui occupait jadis la partie méridionale de la Lorraine. Pourtant, c’est là, dans les environs des communes de Naix-aux-Forges et de Saint-Amand-sur-Ornain dans la Meuse, que gisent sous nos pieds et à notre insu les vestiges de cette glorieuse cité antique. L’association du site de Nasium œuvre depuis quelques années pour réveiller la belle endormie au gré des chantiers de fouilles, des conférences, de la mise en valeur des restes découverts et de l’organisation de grands rassemblements de reconstitution de batailles antiques.
Peu à peu la cité se révèle, livre ses secrets et ses trésors et nous fait revivre la mémoire de son lointain et glorieux passé. Car découvrir Nasium, c’est entrer dans l’histoire d’une ville leuque devenue gallo-romaine qui s’est développée à la fin du IIIème siècle avant Jésus-Christ en contrebas de l’oppidum de Boviolles, à la confluence de l’Ornain et de la Barbouse. C’est également explorer l’univers extraordinaire d’une ville antique d’une superficie de 120 hectares, qui constituait avec Divodurum (Metz), une cité majeure de Lorraine, au carrefour de plusieurs voies de communication importantes.
Le site surélevé de Boviolles ainsi que l’avantage stratégique et défensif qui en découlait, prédestinèrent ce lieu à devenir un centre antique majeur. Ceci commença par la construction d’un oppidum, agglomération gauloise fortifiée sur un site en hauteur. On recense environ une dizaine d’oppida en Lorraine, prenant généralement ancrage sur un site naturellement protégé (colline, méandre de rivière,…) auquel on y ajoutait des remparts en terre, pierre et bois que l’on nomme murus gallicus. L’oppidum de Boviolles s’étend sur près de 70 hectares et est protégé sur trois côtés par des pentes raides. Un murus gallicus de plus de 300 mètres de long et haut de 4 à 5 mètres venait compléter le dispositif défensif.
Après les conquêtes romaines, une ville gallo-romaine se développa donc en contrebas de l’oppidum de Boviolles à la fin du I er siècle avant J-C. A l’apogée de sa prospérité et de son influence économique et politique, l’agglomération antique s’étendait alors sur une superficie de 120 hectares et se dota d’un apparat monumental conséquent. Les différentes campagnes de fouilles menées sur place ont d’ores et déjà permis de dégager les fondations d’un imposant temple gallo-romain de 65 mètres de long et de 76 mètres de côté. On estime que celui-ci fut abandonné vers la fin du IIème siècle après J-C. On sait en outre que Nasium possédait, à l’instar de toutes les grandes cités romaines, un forum, des bâtiments publics, deux ensembles thermaux, un complexe culturel rassemblant plusieurs temples, un théâtre et de nombreuses villas qui ponctuaient ici et là les différents quartiers urbains et leurs réseaux de rues. Par ailleurs, pas moins de cinq nécropoles délimitaient la périphérie de la cité. Tout ceci témoigne donc de l’importance et du rôle que pouvait jouer Nasium à l’époque gallo-romaine, influence qui avait été jusqu’à présent largement sous-estimée.
On situe actuellement l’apogée économique de la ville aux IIème et IIIème siècles après J-C. Mais au cours du Bas-Empire, Nasium commença à décliner au profit d’autres agglomérations antiques, à savoir Toul et Verdun, toutes deux promues au rang de chef-lieu de cité. Enfin, après avoir été très certainement mise à sac au moment des invasions barbares durant le Vème siècle, une nouvelle ville fut reconstruite et fortifiée, qui survécut un temps à l’époque mérovingienne, avant de tomber dans l’oubli.
Seconde étape de notre découverte du patrimoine remarquable en Lorraine : nous vous emmenons cette semaine à la rencontre du géant de la Ligne Maginot, l’ouvrage du Hackenberg en Moselle.
Le Hackenberg : géant de la Ligne Maginot
Les dimensions impressionnantes en font le fort le plus imposant de toute cette ligne défensive ; Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 12 kilomètres de galeries souterraines, 19 blocs de combat, 18 pièces d’artillerie dont plusieurs tourelles faisant chacune plusieurs centaines de tonnes et des cloches GFM (guet fusil-mitrailleur), le Hackenberg pouvait abriter plus de 1000 hommes et 43 officiers à près de 40 mètres sous terre. La visite d’un tel monstre d’acier et de béton reste une expérience inoubliable et enrichissante qui ne pourra laisser indifférent. Elle conduit le curieux au cœur de l’une des plus grandes réalisations techniques du début du XXème siècle.
Situé à Veckring, à une vingtaine de kilomètre de la frontière allemande, l’ouvrage du Hackenberg doit son nom à la colline boisée culminant à 343 mètres du même nom sous laquelle il fut bâti. Le Hackenberg fait donc partie de la fameuse Ligne Maginot, ligne défensive fortifiée composée d’ouvrages plus ou moins importants et équipés, d’abris ou encore de zone artificiellement inondable, notamment près de Sarrebourg, qui protégeait les frontières exposées des Ardennes ou Rhin. Ce réseau de puissantes fortifications porte le nom du ministre de la Guerre qui défendit le projet de loi devant le Parlement en 1930, André Maginot. Il convient d’appréhender la construction de ce dispositif défensif comme une réponse aux traumatismes de la Première Guerre Mondiale et de plus particulièrement de la bataille de Verdun, symbole des tranchées et de la souffrance des soldats. La Ligne Maginot se conçoit en outre comme un dispositif préventif et dissuasif face à une éventuelle et nouvelle invasion allemande. La Ligne Siegfried n’est autre que son répondant de l’autre côté de la frontière. La Ligne Maginot fut réellement mise en chantier en 1930, en raison de la levée de dizaines de millions de francs que nécessitait son financement, et plus particulièrement la construction du Hackenberg qui servit de prototype et d’essai technologique pour de nombreuses autres ouvrages élevés le long de la frontière. L’achèvement de ce géant nécessita 1800 ouvriers et six années de travail. Si le gros œuvre comme le perçage des galeries, fut terminé en 1933, le Hackenberg ne fut livrée qu’en 1936.
Ce puissant ouvrage fortifié constituait un véritable verrou défensif, protégeant une voie naturelle d’invasion entre la vallée de la Moselle et l’Allemagne. Après la déclaration de guerre en 1939 et la période de vigilance extrême de la « Drôle de guerre », le Hackenberg tint parfaitement son rôle lors de l’invasion allemande en 1940. Invincible sans pourtant avoir véritablement combattu, il fut cédé aux troupes d’Hitler après la reddition française. En effet, la Wehrmacht contourna la Ligne Maginot à l’Ouest par les Ardennes avant d’encercler l’armée française, le tout en à peine six semaines. La débâcle française symbolisa le triomphe de la Blitzkrieg ou « guerre-éclair », stratégie militaire destinée à faire capituler l’ennemi en un minimum de temps sous l’action conjuguée des divisions blindées au sol au sol et des forces aériennes de la Luftwaffe. Si bien que les traces de combat affectant différents blocs du Hackenberg furent occasionnées par l’artillerie de la troisième armée américaine du général Patton. D’ailleurs, une agréable promenade autour des extérieurs du fort, permet au visiteur de mieux apprécier les stigmates et la violence des combats sur les parois de l’entrée des Hommes notamment et toute la puissance des blocs observatoires et des tourelles de plusieurs dizaines de kilomètres de portée, qui du haut de la colline, surveillent la vallée immuablement. Un fossé antichar assez impressionnant est également visible.
C’est accompagné d’un guide de l’association Amifort Veckring que vous pouvez plonger dans les entrailles souterraines de l’ouvrage fortifié. Un métro, servant à transporter hommes et munition dans les galeries vous permet de parcourir les trois kilomètres visitables du fort. L’organisation et la vie quotidienne des soldats cloîtrés sous terre s’appréhendent alors au grès des différentes pièces toutes à la pointe de la technologie du début des années 1930 : poudrières, obusiers, gare de triage, centrale électrique capable d’alimenter une ville de 10000 habitants, cuisines ultramodernes et fonctionnelles. Un petit musée d’armement et d’uniformes de la Seconde Guerre Mondiale complète agréablement le parcours. Mais le clou de cette passionnante visite reste la démonstration et la mise en service d’une des plus imposantes tourelles de l’ouvrage, celle du bloc 9 pour deux lance-bombes de 135 mm. C’est là que se révèle toue la puissance mécanique de cette pièce de plusieurs centaines de tonnes qui sort de terre prête à faire feu. A tout point de vue le Hackenberg est IMPRESSIONANT !
Suite de notre série consacrée au patrimoine remarquable de Lorraine, avec une troisième escale à Châtel-sur-Moselle dans les Vosges où nous attendent les vestiges de la plus imposante forteresse européenne.
Le plus grand château-fort d’Europe
Puissamment assise sur son éperon rocheux, la forteresse de Châtel-sur-Moselle veille depuis des siècles sur le passage hautement stratégique de la Moselle, puisqu’étant situé au croisement de trois anciennes voies romaines et au débouché de la route de Bourgogne. Il n’est donc pas étonnant de constater que la forteresse joua un important rôle tout au long de l’histoire.
Les historiens situent aujourd’hui entre 1072 et 1100 la construction d’un premier château à Châtel. Celui-ci se composait alors principalement d’un imposant donjon, servant de résidence seigneuriale, de quatre étages et haut de 35 mètres. D’abord possession des Comtes de Vaudémont, branche cadette de la maison de Lorraine depuis 1072, le site de Châtel passa successivement sous la suzeraineté des Comtes de Bar vers 1200, puis sous celle de la puissante famille comtoise des Sires de Neufchâtel par mariage en 1373. Ces derniers firent de Châtel un centre important d’influence bourguignonne.
Ce n’est qu’en 1544 que le château-fort agrandi de Châtel devint lorrain par échange. La forteresse résista courageusement à l’invasion française durant la guerre de Trente ans et changea neuf fois de main entre 1634 et 1670 en autant de sièges successifs. Son démantèlement fut ordonné par les Français en 1671. Ces derniers menaient en effet une politique systématique. A chaque prise de ville fortifiée ou de château, ils y détruisaient tous éléments militaires. Le même sort fut bien évidemment réservé à la forteresse de Châtel-sur-Moselle. Les Français commencèrent par faire sauter les tours et les principaux bâtiments avec de la poudre. Mais devant la puissance de la forteresse, ils comprirent très vite que la facture de poudre allait revenir chère. Ils arçonnèrent par conséquent la population à recouvrir le château de terre, quatre mois durant. Ce qui permis finalement de nous la restituer en partie jusqu’à aujourd’hui au terme d’un long travail de dégagement qui se poursuit encore actuellement. C’est ce travail que mène patiemment depuis 1972 l’Association du Vieux Châtel. Elle permit en outre à ses débuts d’empêcher la construction de deux nouveaux immeubles sur le château enterré. Même si, deux autres bâtiments avaient été élevés quelques années auparavant.
Bâti sur un promontoire calcaire au bord de la Moselle et isolé du plateau par de puissants fossés de 57 mètres de largeur, le château dominait la ville et son enceinte, flanquée de douze tours et dotée de deux porteries. Trois extensions successives permirent de faire de cette forteresse la plus grande d’Europe. Le château primitif des XIème et XII siècles fut d’abord agrandi vers le milieu du XIIIème siècle. Mais ce n’est qu’au XVème siècle, vers 1410-1420 puis vers 1444-1460, qu’il connut une extension considérable et une précoce adaptation à l’artillerie. La longueur cumulée des ses deux enceintes, constituées de 21 tours, atteignait 1,4 km ! Un réseau complexe de galeries réunissait les ouvrages de défense et permettait de faire communiquer le château avec la ville basse et la rive de la Moselle. Une grande partie de ce réseau a d’ores et déjà été dégagé. Les souterrains de la forteresse constituent la majeure partie de la visite. C’est là, au fil des caves voûtées, des salles de gardes et autres pièces médiévales parfaitement conservées, que s’apprécie pleinement l’élaboration et le fonctionnement de ce gigantesque outil défensif. Un léger ruissellement accompagne les pas du curieux qui se trouve très vite conquis par la majesté et la beauté des lieux et qui croise au bout d’une profonde galerie une étroite rivière souterraine qui permettait aux assiégés de ne pas manquer de réserve d’eau, et ce, à l’insu de l’ennemi. Ce cliquetis ajouté à la pénombre ambiante contribue à créer une atmosphère étrange et mystérieuse, presque mystique.
Après avoir regagné la surface, une promenade autour des remparts s’impose et permet d’apprécier de l’extérieur toute la puissance de l’édifice. Car en arrivant sur le promontoire rocheux, les vestiges mis à jour laissent à peine entrevoir que sous nos pieds gis encore une partie non négligeable de ce qui fut la plus grande forteresse d’Europe. Si le visiteur peut aujourd’hui explorer plus en profondeur ce fabuleux édifice, il ne faut pas oublier que le chantier continue. Ainsi, chaque année, grâce à des bénévoles internationaux et des contrats emploi-solidarité qui œuvrent au dégagement et à la consolidation des tours et murailles, Châtel se révèle toujours un peu plus. Si bien que petit à petit, la forteresse autrefois enterrée par les Français refait surface, pour mieux nous livrer tous ses secrets.
Enfin, quelques dizaines de mètres plus haut sur le promontoire, un petit détour par l’église Saint-Laurent datant du XVème siècle complète agréablement la plongée dans l’univers médiévale de Châtel-sur-Moselle.
Nouvelle étape de notre découverte du patrimoine remarquable de Lorraine à Saxon-Sion, lieu mythique et mystique devenue au fil du temps et des légendes un des symboles forts de notre province.
Le signal de Sion-Vaudémont ou la colline inspirée
Son nom est évocateur, mystérieux. C’est un lieu où souffle l’esprit écrivit Maurice Barrés au sujet de la fameuse colline de Sion dans son roman religieux et culturel, La Colline inspirée, en 1913. A bien des égards la colline de Sion est un endroit singulier et étrange, surprenant, qui a de tout temps fasciné les voyageurs et les pèlerins. La colline de Sion-Vaudémont, son appellation complète, est située dans le Saintois, pays du Sud de la Meurthe-Et-Moselle. Sa forme si caractéristique de fer à cheval s’élève à plus de 542 mètres d’altitude. Dominant ainsi la plaine, la butte offre un panorama infini sur les vieux vergers traditionnels ainsi que les vestiges d’un château-fort construit par les Comtes de Vaudémont, la Tour Brunehaut.
D’un point de vue géologique, la colline de Sion est en réalité une « butte-signal », c’est-à-dire un site en hauteur au milieu d’une plaine ou d’un plateau. La colline s’est en fait détachée progressivement du reste des côtes de Moselle. D’ailleurs, le monument Barrés, véritable phare élancée éclairant de sa splendeur tous les environs, est le point le plus haut du plateau lorrain.
Outre la symbolique forte qu’elle représente pour la Lorraine, point sur lequel nous reviendrons un peu plus loin, la colline est célèbre pour ses « étoiles ». Les étoiles de Sion sont des restes fossilisés d’animaux marins appelés crinoïdes ou encrines, qui prospéraient dans la région au Jurassique, il y a près de 170 millions d’années. La Lorraine était alors recouverte par une vaste mer chaude. Les encrines y vivaient en colonies dans les fonds. Ces animaux s’apparentaient aux étoiles de mer et aux oursins. Décrits comme des fleurs, les encrines sont également nommés lys des mers. Si on trouve des étoiles un peu partout sur la colline et mêmes aux alentours, c’est en face du lieu dit « La Croix Sainte-Marguerite » que vous aurez le plus de chance d’en apercevoir.
La légende du « Saut de la Pucelle » est une des origines mythique des étoiles de Sion. Sur cette butte-témoin se trouve un endroit escarpé et dangereux nommé le Saut de la Pucelle. Cette portion de forêt dont le sol serait presque incliné à la verticale absolue constitue une haute falaise à pic, cachée par la végétation. On raconte ainsi qu’un chevalier noir se serait épris de l’une des filles du seigneur de Vaudémont et aurait décidé de s’emparer d’elle de force. Ce dernier entreprit de commettre son forfait un soir où la belle revenait à cheval du sanctuaire de la Vierge à Sion. La jeune femme ayant compris la manouvre de son agresseur se serait alors enfouie en direction du saut et aurait invoqué la Vierge de Sion à son secours. Le cheval de la belle tomba miraculeusement debout sur une large pierre sur laquelle il marqua profondément les quatre fers de ses sabots. Au même moment, la Vierge saisit dans le ciel une poignée d’étoiles que la nuit tombante venait d’allumer et les jeta dans les yeux du cavalier noir et de sa monture. Tous deux s’écrasèrent dans le précipice. C’est depuis ce temps immémoriale que l’on trouverait des étoiles par myriade sur la colline Les gens du coin affirment qu’il y a encore quelques années, on pouvait voir la marque des sabots de la monture de la belle sur une pierre en contrebas.
Plus terre-à-terre, la chute d’un cavalier dans le Saut de la Pucelle n’avait rien d’impossible. En effet, comme nous l’avons déjà évoqué, les très grands arbres qui croissent dans la pente abrupte pouvaient empêcher un étranger de réaliser la présence et l’exceptionnelle intensité de la déclivité, faisant ainsi qu’un cavalier pouvait fort bien se rendre compte trop tardivement du danger qui le guettait.
La colline de Sion-Vaudémont est l’un des rares sites en Europe qui accumule une mémoire archéologique correspondant à plusieurs millénaires de peuplement. Sion est occupée depuis au moins quatre mille ans. En effet, la colline, en dominant les terres environnantes a pu jouer un rôle stratégique important. Le site connut ainsi une première vague d’occupation significative au Néolithique, comme en témoigne la découverte de haches-marteau en pierre polie, de céramiques et de pointes de flèches en silex taillé. C’est également ici que les Leuques venaient honorer Romertha, la déesse de la fécondité. Les Romains y édifièrent ensuite un temple dédié à Mercure, dieu du commerce. De même, Sion représente le premier témoignage du christianisme en Lorraine, avec les traces d’un monument remontant au Vème siècle. Sion s’est presqu’immédiatement révélé comme un lieu de dévotion populaire de la Vierge mariale dès le Xème siècle. Plus tard, sous l’influence des Comtes de Vaudémont, devenus Ducs de Lorraine, des pèlerinages vinrent s’y développer
Bien des années après la destruction par les troupes françaises des fortifications de Vaudémont au XVIIème siècle sous ordre de Richelieu, on fit inscrire en 1873, soit deux après la défaite de la France contre la Prusse, sur l’autel de l’église Notre-Dame de Sion la mention « Ce n’est pas pour toujours » en patois lorrain. Ceci afin de traduire le renoncement de l’Alsace et d’une partie de la Lorraine au Premier Reich. En 1920, lorsque l’Alsace-Moselle redevint française, ces mots furent recouverts d’une palmette dorée portant la phrase « Ce n’était pas pour toujours ». Depuis la fin de l’annexion au IIIème Reich et par la même occasion de la Seconde Guerre Mondiale, une seconde croix repose à côté de la première avec cette fois l’intitulé, toujours en patois lorrain, « Maintenant c’est pour toujours ». Gageons que non pour la liberté de la Lorraine. Enfin, en 1973, à l’occasion du centenaire de la première inscription, on rajouta le mot « Réconciliation » en français.
Mais le monument le plus emblématique de la colline reste toutefois la basilique Notre-Dame de Sion, preuve que la butte demeure encore un sanctuaire dédié à la Vierge Marie et un haut lieu de culte faisant toujours l’objet de pèlerinages. L’histoire de cet édifice religieux commence au Xème, époque à laquelle l’évêque Saint-Gérard de Toul construisit l’église de Sion et fit placer une statue de la Vierge derrière l’autel. C’est en 1306 que le huitième comte de Vaudémont, Henri III, fit bâtir le chœur actuel dans lequel fut placée la nouvelle statue de la Vierge allaitant l’enfant Jésus. En 1741, les religieux Tircelins dotèrent la basilique d’une nef plus grande permettant d’accueillir la foule des pèlerins. La statue monumentale de la Vierge trônant au sommet du clocher mesure 7 mètres et pèse 8 tonnes. Elle date de 1871 et fut fondue dans les ateliers de Vaucouleurs. A noter enfin que l’imposante tour de la basilique culmine à 45 mètres. Cette dernière revient de loin, car le 8 novembre 2003, un incendie dû à un court-circuit électrique la ravagea, causant d’importants dégâts et la dépose de la gigantesque statue. En 2007, après quatre années de restauration, la statue fut replacée au sommet de la basilique.
Un couvent et un cloître complètent le sanctuaire. Le couvent fut fondé par le Duc François II en remerciement de la Vierge de l’avoir aidé à retrouver le testament de René II établissant la loi salique en Lorraine. Bâti sur les vestiges d’un vaste complexe gallo-romain datant du IIème siècle, le couvent se compose de quatre corps entourant une cour centrale carrée.
Le Conseil Général de la Meurthe-et-Moselle a récemment acquis l’ensemble du site dans le but d’y mener d’importants travaux de rénovation et d’embellissement, en partie achevés aujourd’hui. S’inscrivant dans un ambitieux projet de promotion, le département souhaite faire de ce site exceptionnel et emblématique un nouveau phare du tourisme en Lorraine.
Nouvelle halte de notre parcours à Sillegny, en Moselle, où se cache une splendeur méconnue du patrimoine lorrain, à savoir l’église Saint-Martin, surnommé chapelle Sixtine lorraine en raison de ses magnifiques fresques du XVème et du XVIème siècle.
La chapelle Sixtine lorraine
Le pays messin constitue un espace d’influence qui a traversé les siècles, dont les richesses ont attiré toutes les convoitises. C’est au cours du XIVème siècle que la région de Metz s’érige en circonscription territoriale, réunissant 136 villages, soumis à la juridiction de la République Messine, véritable puissance commerciale et marchande. Il n’est donc pas étonnant d’y trouver une remarquable concentration d’églises fortifiées, la plupart construites sur les hauteurs à la périphérie des habitations. En effet, ces dernières protégeaient hommes et bétail des raides sanglants sur la cité messine et ses environs menés par les Français et les troupes des Comtes de Bar. La silhouette de ces édifices religieux et militaires implantés sur les côtes de Moselle fait désormais partie intégrante du paysage. Leur pièce maîtresse est une tour massive, parsemée de meurtrières, le plus souvent carrée, qui servait d’abris en cas d’attaque. Le climat d’insécurité des temps féodaux faisait ainsi de l’église le centre des communautés villageoises. Il subsiste aujourd’hui une vingtaine d’églises fortifiées et autant de fermes-châteaux dans le pays messin. Les plus belles se trouvent à Vaux, Lorry-Mardigny, Lessy, Arry, Marieulles-Vezon et bien sûr Sillegny.
Ce petit village agricole de la vallée de la Seille abrite en effet un joyau de l’architecture gothique. Même si sa nef date du XVème siècle, ce sont surtout ses fresques et leur incroyable fraîcheur qui méritent le voyage. Elles évoquent le Jugement dernier, le Paradis et ses anges, l’Enfer et ses diables, l’Arbre de Jessé, l’histoire du Christ, de la Vierge, des apôtres et de tous les saints. Plus que de la peinture, les murs de l’église sont une véritable encyclopédie biblique. Ce livre ouvert aux yeux de tous servait à enseigner de manière naïve et émouvante le culte et la vie religieuse à une population encore largement analphabète. C’est pourquoi l’église fut « baptisée » chapelle Sixtine lorraine. Elle est de fait contemporaine de celle de Rome, peinte trente ans plus tôt par Michel-Ange. La légende raconte qu’en 1540 et à la demande du curé du village, un peintre italien ambulant décora l’église de peintures tirées des évangiles.
Aujourd’hui, plusieurs hypothèses circulent toujours sur l’identité des artistes. La réalisation de ces dessins travaillés à l’œuf et à la colle est parfois attribuée à des peintres envoyés par les sœurs du cloître Sainte-Marie-aux-Nonnains de Metz. Elles furent recouvertes de badigeon vers la fin du XVIIIème siècle, ce qui permit entre autre de les conserver. Elles ne furent redécouvertes qu’en 1845 lors d’un grattage de l’abside et furent l’objet d’une première restauration, puis d’une seconde qui pris fin en 2004, révélant toute la délicatesse et la finesse de l’exécution ainsi que la beauté des illustrations. Deux peintures sont particulièrement exceptionnelles par leurs dimensions et leur symbolique.
Il s’agit tout d’abord de l’Arbre de Jessé qui mesure trois mètres soixante de large et sept de haut. Mais il est surtout important pour le message qu’il délivre : Jésus est de la famille des hommes. L’Arbre de Jessé est un thème très répandu. Il reproduit l’arbre généalogique du Christ. Le Jugement dernier est quant à le plus grand tableau de l’église Saint-Martin de Sillegny, puisqu’il couvre une superficie de 42 mètres carrés. Il représente le retour du Seigneur à la fin des temps, montrant ainsi en images comment nos ancêtres imaginaient cet évènement relaté dans l’évangile selon Saint-Matthieu. En effet, la fin du Moyen-âge est marquée par une succession de fléaux tels que famine, peste, guerres. Ainsi, l’insécurité dans laquelle vivaient les hommes modifia leur façon de pensée. On ne concevra donc plus le retour de Dieu comme une attente sereine accompagnée de paix et de tendresse, mais comme un moment dramatique et impressionnant qu’il faut craindre. Le retour de Dieu était un symbole d’espérance. A Sillegny, la représentation fut fortement influencée par les fameux Mystères de la fin du Moyen-âge, de sorte que le Jugement dernier devient donc un événement épouvantable pour les damnés à qui l’on inflige supplices et châtiments divers. Tandis qu’à Rome, Michel-Ange termina les fresques de la chapelle Sixtine avec la création du monde qui se conclut par la création de l’Homme. Dieu lui tendant sa main pour lui transmettre la vie. A Sillegny, c’est donc au contraire le Jugement dernier qui a eu les faveurs des peintres.
Quoi qu’il en soit, l’église de ce paisible village lorrain, est à tout point de vue remarquable et incontournable.
Nous nous rendons cette semaine à Nancy pour y admirer une autre merveille cachée et méconnue de la cité ducale, l’église Notre-Dame-de-Bonsecours, tout juste restaurée et rouverte au public.
L’église Notre-Dame-de-Bonsecours de Nancy : le sanctuaire de Stanislas
Au préalable, un bref rappel historique est nécessaire afin de mieux comprendre les origines du sanctuaire. Le 5 janvier 1477, emmenés par le duc René II, les Lorrains écrasèrent les Bourguignons. Cette date marque la fin de la bataille de Nancy par la mort de Charles le Téméraire. Des milliers de soldats ayant péris dans la bataille sont inhumés dans une fosse commune non loin du ruisseau de Jarville. L’étendard de René II portait lors de la bataille l’image de l’Annonciation. Un religieux obtint en 1484 du duc la permission d’élever une chapelle et un ermitage sur ce lieu emblématique qui symbolise l’indépendance lorraine face aux ambitions étrangères. René II place le sanctuaire sous le patronage de Notre-Dame-de-Bonsecours, même s’il est parfois nommé Notre-Dame-de-la-Victoire. Les Lorrains l’appellent quant à eux « chapelle des Bourguignons ». Cette dernière abrite une statue de la Vierge sculptée en 1505 par Mansuy Gauvain, artisan ordinaire de René II, qui travaillait également à la porterie du Palais ducal. Cette œuvre demeure un rare spécimen de la sculpture lorraine de la fin du Moyen-âge.
La chapelle, qui fut l’objet de remaniements et d’agrandissements successifs, fut rasée par Stanislas qui posa la première du nouveau sanctuaire en 1738 avec l’intention d’en faire la chapelle funéraire de sa famille. En effet, n’étant pas de la maison de Lorraine, les Leszczynski ne pouvaient pas prétendre à une sépulture au côté des anciens ducs dans la chapelle des Cordeliers. La réalisation de ce sanctuaire permit donc au roi déchu de Pologne d’ancrer son règne et la postérité au cœur de la mémoire des Lorrains. Ainsi, il commanda au jeune architecte Emmanuel Héré une église présentant une parenté certaine avec l’ancien sanctuaire du cimetière Saint-Nicolas de Vienne. Héré inséra dans la façade quatre colonnes colossales d’ordre composite provenant du château inachevé de la Malgrange. Stanislas ne resta pas insensible au culte marial lié à cette église qui lui rappelait toute la vénération dont la Vierge jouissait dans son pays d’origine. La localisation de l’église de Bonsecours à la croisée des chemins de la Malgrange, de Nancy et de la route de Lunéville, explique aussi son choix pour y réaliser son sanctuaire. Stanislas souhaitait en outre, par nostalgie, une église à l’atmosphère polonaise.
Ainsi, Notre-Dame-de-Bonsecours, à la décoration intérieure très chargée, est l’un des rares témoignages du style rococo religieux en France. Celui-ci est particulièrement expressif dans les statues polychromes qui ornent la nef, la chaire très ouvragée, les stucs colorés des placages et la grille du chœur. Les voûtes peintes de fresques de 1742 par Gilles Provençal représentent l’Annonciation, l’Assomption, l’Immaculée-Conception et des emblèmes de la Vierge. Ces fresques témoignent de la diversité culturelle des Lumières, avec des influences venues de France et d’Italie notamment, conformes au goût de Stanislas. Les drapeaux turcs décorant le sanctuaire évoquent quant à eux les victoires des princes lorrains lors des batailles du Saint-Gothard (5 août 1664 par Charles V), de Mohács (12 août 1687 par Charles-François) et de Méhadia (13 juillet 1738) par François III.
D’un point de vue architectural, Emmanuel Héré réalise ici l’une de ses premières œuvres terminées en 1741. Limité par l’espace disponible, il donne à la façade étroite cette forme très élancée. La hauteur est encore accentuée par un clocher, surmontée d’un toit bulbeux, couronné d’une flèche. De même, l’étroite nef n’en est pas moins haute de 18 mètres, coupée par une archade surbaissée et dominée par la voûte. Les murs sont couverts d’un revêtement de stuc coloré, aux motifs géométriques, donnant ainsi l’apparence du marbre, ainsi que d’un arc triomphale tendu de fausses draperies. Un orgue Cuvilier complète l’harmonieux ensemble au-dessus de l’entrée. Mais ce sont véritablement les tombeaux de Catherine Opalinska, de François-Maximilien Ossolinski, de Stanislas Leszczynski et de Marie Leszczynska qui constituent les joyaux de Notre-Dame-de-Bonsecours.
Le monument de la reine Catherine Opalinska, œuvre de grandes dimensions, est mis en place en 1749. La reine y est représentée agenouillée sur son tombeau, ce dernier étant placé devant une pyramide de marbre et supporté par un socle élevé. Un ange la guide vers le ciel, dont les splendeurs entrevues éclairent son visage. A ses pieds ont été déposés son sceptre et sa couronne. Enfin, un aigle qui tourne sa tête en direction de la souveraine couvre le tombeau de ses ailes magnifiquement déployées. L’ensemble est exécuté dans la pure tradition berninesque,reflétant ainsi une attitude théâtrale, un corps déhanché et des vêtements agités, courant qui inspirait les artistes de cette époque.
François-Maximilien Ossolinski, grand trésorier de la couronne de Pologne et grand maître de la maison du roi, avait fidèlement suivi Stanislas. Il est représenté sur son tombeau en marbre blanc enveloppé dans le grand manteau de chevalier du Saint-Esprit, à côté d’un couple d’angelots veillant sur les armes du duc.
Stanislas, décède quant à lui le 23 février 1766, à quatre-vingt-huit ans au château de Lunéville. Mais Louis XV, gendre du roi de Pologne, sera moins généreux que son beau père pour Catherine Opalinska. Le mausolée de Stanislas est placé juste en face du monument de cette dernière. Son ordonnance générale est la même que celle du tombeau de Catherine. Le roi, vêtu à la polonaise, est représenté couché à la manière antique. Sa main droite est appuyée sur un bâton de commandement. Les attributs de la royauté sont en outre à ses côté. Sur le vaste socle qui supporte le tombeau est posé le globe terrestre à demi enveloppé dans un voile de deuil, symbole de la douleur universelle que causa la mort du souverain. On remarque à gauche, la Charité qui se pâme, prostrée, et à droite, la Lorraine agenouillée, tournant avec affection son regard vers le souverain.
Enfin, Marie Leszczynska, fille de Stanislas et reine de France, pour marquer son affection à Nancy, avait souhaité que son cœur repose dans la cité ducale. Elle décéda le 24 juin 1768 et son cœur fut transporté dans le caveau le 23 septembre de la même année. Le monument de Marie Leszczynska est de petite dimension, un médaillon de marbre blanc que découvrent deux génies en pleurs, dont l’un présente le cœur en sa main, donne le profil du visage de la reine.
L’église, qui reçu maintes visites princières, ne devient paroisse qu’en 1844. Le pape Pie IX, offre en 1865, un diadème, surmonté d’une croix de Lorraine, tenu par deux anges symbolisant la France et la Lorraine. Depuis, le sanctuaire est devenu indissociable de l’histoire de la Pologne. D’illustres personnalités comme de simples citoyens polonais de passage se sont recueillis et se recueillent encore sur le cénotaphe de Stanislas.
Nous faisons escale cette semaine dans les Vosges mosellanes pour y admirer l’un des monuments les plus insolites et remarquables du très riche patrimoine lorrain, le fameux rocher de Dabo.
Le rocher de Dabo : le phare de la ligne bleue des Vosges
Il s’élève comme une île, un récif, au beau milieu de cet océan de verdure constitué presqu’exclusivement de résineux. C’est là, sur les contreforts des Vosges mosellanes, dans ce cadre somptueux et enchanteur, véritable paradis des randonneurs, que se dresse le rocher de Dabo. Celui-ci constitue en tout point une curiosité et un site incontournable de tout le massif vosgien. Formé il y a plus de 200 millions d’années pendant l’ère du Trias, cet extraordinaire rocher de grès rose (647 mètres) est surmonté de la chapelle Saint-Léon (664 mètres) datant de 1889 de style néo roman auquel on ajouta une tour, qui servirait de belvédère pour le Club Vosgien. Au-dessus du porche, on remarque les armoiries des Comtes de Dagsbourg et celles de Saint-Léon sculptées dans le grès. Au-dessus de ce même porche et dans un renfoncement de la tour, se tient une piéta blanche. La voûte de l’édifice est ornée de médaillons peints sur toile, représentant les parents et les deux sœurs de Saint-Léon, patron de Dabo. C’est ici que serait né en 1002, Bruno de Dabo, évêque de Toul qui fut élu Pape en 1048 sous le nom de Léon IX.
Le rocher offre un magnifique panorama sur le plateau lorrain et la ligne bleue des Vosges aux sommets recouverts d’immenses forêts. Le soir, la vue sur le rocher avec la chapelle illuminée est époustouflante de magie et de mystère.
Le vaste territoire de la commune de Dabo s’étend sur le versant Ouest du massif vosgien, dans sa partie gréseuse. Les épineux et les fougères couvrent une importante partie du ban communal. L’histoire de ce petit village blottie dans une clairière au cœur des forêts et des montagnes mérite que l’on s’y attarde un peu. C’est au Xème siècle que fut construit le château de Dabo (ou Dagsburg) sur le rocher. Les murailles encerclaient le pourtour de celui-ci et protégeaient une tour d’habitation, de petites tours de guet ainsi qu’un bâtiment pour les réserves et les écuries et un puits. Ce dernier est encore visible aujourd’hui derrière la chapelle. Le comté passa ensuite sous l’autorité de la famille des Linange en 1225. Les Comtes de Linange qui refusèrent allégeance à Louis XIV, prirent les armes contre lui en 1672. Mais après un long siège devant le château, qui constituait un obstacle à l’avancée des troupes françaises, celui-ci dut capituler le 13 mars 1677. Le château de Dabo fut rasé en 1679 sur les ordres du roi de France et de son ministre d’Etat, Louvois, avant que quelques siècles plus tard, un nouveau monument, la chapelle, vienne recouvrir le sommet du rocher.
Une ancienne coutume fait encore aujourd’hui la curiosité du village. En effet, vers la fin du Xème siècle, les guerres dévastaient régulièrement le pays. Pour le repeupler, les seigneurs attirèrent des colons venant de France, de Bavière, de Suisse et du Tyrol. Ils leur accordèrent de nombreux droits forestiers. Le plus ancien règlement date de 1569, et, de nos jours, les habitants de la commune, descendants de ces colons, bénéficient toujours de ces droits dont le plus important est le bois bourgeois, c’est-à-dire l’octroi de huit arbres résineux par an. L’attribution de ces huit arbres donne lieu à une importante foire annuelle après le 11 novembre.
Enfin, d’autres lieux insolites sont à découvrir dans la commune et dans les environs. Ainsi, nous pouvons noter les maisons troglodytiques du Falkenfelsen, antérieures à 1789, soigneusement restaurées et visitables, la cristallerie de Dabo et ses tailleurs de verre, ainsi que le cimetière romain de Beimbach, au lieu-dit des « Trois Saints », sur les hauteurs de Walscheid. Entouré d’un muret, le cimetière se compose de pierre de grès taillées en forme de maison, posées sur une dalle.
Cette semaine nous retournons dans la Meuse pour faire escale dans le petit village d’Avioth. Ce dernier recèle en effet l’un des plus beaux édifices religieux de Lorraine.
La Basilique Notre-Dame d’Avioth
La basilique Notre-Dame d’Avioth fut construite entre le XIIème et le XVème siècle dans le style gothique flamboyant. Ce magnifique monument est particulièrement impressionnant. Il tranche radicalement avec le modeste village qu’il domine. Il est par ailleurs parfaitement conservé.
La construction de la basilique d’Avioth s’est principalement faite en trois phases. Les étages inférieurs des tours et les bas-côtés datent de l’époque la plus ancienne, c’est-à-dire de 1250 à 1310. Le chœur et la sacristie ont été bâtis entre 1340 et 1350. Enfin, la dernière période de travaux se déroula de 1375 à 1400. Elle fut marquée par la fusion entre la partie occidentale et la partie orientale de l’édifice. Les portails Sud et Ouest furent également exécutés à cette époque. Ce dernier est orné de 70 figures et d’une représentation du Jugement dernier. La façade occidentale, très harmonieuse, est flanquée de deux tours. Au sommet de cette façade, au-dessus de la rose supérieure ainsi qu’à la base du pignon, se tient un magnifique médaillon circulaire groupant huit têtes. Celle du centre, sereine, est entourée de sept figures grimaçantes, représentant très probablement les sept péchés capitaux. Elle désigne ainsi l’âme élue qui a su résister aux tentations.
Le lumineux intérieur recèle plusieurs trésors parmi lesquels une sculpture en bois de tilleul de Notre-Dame d’Avioth, datant du début du XIIème siècle et posée sur un trône de pierre du XVème siècle, qui domine quatorze autres statues polychromes, un maître-autel du XIVème siècle, un tabernacle gothique du XVème siècle ainsi qu’une chaire décorée Renaissance de 1538. Cette dernière, dont la pierre est finement sculptée, porte encore les traces de couleurs. La présence d’une coursière, c’est-à-dire un chemin de circulation, fait exceptionnel dans la région, ainsi que d’un déambulatoire sur le quel donnent des chapelles peu profondes, constituent déjà à eux seuls des curiosités. Des travaux de restauration ont enfin fait apparaître des peintures et des fresques des XIVème et XVème siècles, notamment une Vierge à l’Enfant avec Saint Jean-Baptiste et Sainte Agnès.
La basilique d’Avioth fait en outre l’objet d’un pèlerinage depuis le début du XIIème siècle, depuis la découverte de la statue d’une Vierge miraculeuse. Cette statue de bois, que nous avions mentionnée plus haut, s’est donc rendue célèbre pour ses miracles, en particulier la « résurrection » temporaire des enfants mort-nés afin de leur permettre de recevoir le premier sacrement, à savoir le baptême. Cette cérémonie qui perdura jusqu’en 1786, fut par la suite interdite par les autorités ecclésiastiques. Le pèlerinage se poursuit cependant encore de nos jours. En effet, chaque année, le 16 juillet, de nombreux Lorrains, Belges et Luxembourgeois se rendent à Avioth pour prier et participer à la procession. En 1993, le pape Jean-Paul II reconnut l’importance de ce pèlerinage et fit élever l’église au rang de basilique.
Mais la véritable merveille de cette basilique et qui fait d’Avioth un site si particulier et si exceptionnel, c’est cette « petite chapelle » de quatorze mètres de haut et de quatre mètres de diamètre, que l’on appelle la « Recevresse ». Cette dernière est un monument unique au monde. Ce chef d’œuvre du gothique flamboyant a vraisemblablement été construit à l’endroit de la découverte de la statue miraculeuse. Au début du XIVème siècle, lorsque la statue de Notre-Dame d’Avioth put entrer dans l’église, une autre statue de la Vierge prit sa place pour recevoir, en son nom, les offrandes des pèlerins. On appela donc cette statue « la Vierge Recevresse », nom qui fut avec le temps donné au monument.
Ainsi, depuis huit siècles, la basilique est entretenue grâce aux dons. A n’en pas douter, Avioth est vraiment un lieu remarquable qui vaut le voyage.
Nouvelle étape de notre fabuleux voyage consacré au patrimoine remarquable lorrain à Fléville-devant-Nancy, pour y admirer l’un des plus beaux châteaux de la route des Marches de Lorraine.
La vie de château à Fléville
Plus de sept siècles d’histoire imprègnent les pierres de ce magnifique château de style Renaissance, adossé à un donjon féodal de 1320, qui rivalise par sa beauté avec les châteaux de la Loire. L’édifice constitue également l’un des rares châteaux lorrains épargnés par Richelieu sur ordre de Louis XIII à l’issue de la Guerre de Trente Ans.
La façade, achevée en 1533 et typique de la première renaissance française, est parcourue en totalité par un splendide balcon ouvragé, unique en son genre, long de 35 mètres. Le château de Fléville est d’ailleurs souvent comparé à celui d’Azay-le-Rideau pour la pureté, l’harmonie et l’équilibre de ses lignes. Il conserve également en plus du donjon de 30 mètres de haut, les douves asséchées du château féodal. La salle du Chevalier de Fléville et le four à pain datent eux-aussi du XIVème siècle. La cour, qui fut ouverte au XVIIIème siècle, est ornée de vases rocailles. Le château est en outre toujours habité par la même famille depuis 1812.
En ce qui concerne l’intérieur du château, le visiteur ne sera pas en reste, puisque quinze pièces sont ouvertes au public, dont certaines, remarquables par leur décor et leur atmosphère, valent véritablement le détour. Parmi celles-ci on notera ainsi plus particulièrement la Grande Salle des Etats de Lorraine (ancienne salle des Chevaliers) et les grands appartements ou vinrent séjourner les Ducs de Lorraine. La Salle des Etats de Lorraine, située sur deux étages et réaménagée en 1863, est dédiée à la maison de Lorraine. On y retrouve ainsi les armoiries de tous les Ducs et Duchesses, peintes à fresques. C’est un témoignage exceptionnel de l’histoire de notre province de 1048 à la mort de Stanislas en 1766. Elle constitue également un exemple unique de l’art troubadour en Lorraine. Contiguë à la Salle des Etats de Lorraine, se trouve la chambre de Stanislas. C’étaitt le grand appartement dédié au Duc. Des tableaux historiques illustrent les grands évènements historiques de l’Europe du XVIIème siècle. Un salon du XVIIIème siècle se tient quant à lui au rez-de-chaussée. Un mobilier d’époque et des tapisseries au chinois lui prêtent un somptueux décor. Les autres pièces visitables du château sont essentiellement constituées de charmantes chambres, aménagées avec goût : lits à la duchesse, mobilier d’apparat, nombreux tableaux, notamment du Bassan. Elles sont ainsi une invitation au rêve et à l’évocation de la vie de château. A noter enfin que la chapelle, située au cœur de la demeure, est particulièrement attachante avec ses vitraux anciens, ses reliquaires du XVIIème siècle et ses nombreux témoignages de l’art religieux.
Un parc labélisé « Jardin remarquable » entoure le château. Pas surprenant quand on sait que Fléville possède sans conteste l’un des plus beaux parcs agricoles et paysagers du XIXème siècle. Il est l’œuvre de Paul de Lavenne, comte de Choulot et est également le seul parc privé qui soit classé monument historique. Il présente un jardin potager, un verger et une roseraie. Le parc, qui était à l’origine un jardin à la française, a été partiellement transformé en jardin romantique de 20 hectares. Celui-ci s’étend en face de l’Orangerie du XVIIIème siècle dont il est le prolongement naturel, ainsi qu’à côté de la « maison de l’oiseleur », petite merveille qui le surplombe. Le promeneur pourra également y apprécier un trompe l’œil du XVIIème siècle. Dans la conception du parc du château, le talent de Choulot fut réellement de respecter les proportions d’espace mettant en valeur la magnifique bâtisse. Ainsi, la grande pelouse à l’arrière de la demeure laisse toute liberté à son propriétaire de l’interpréter comme une prairie et de songer que toute cette masse de lumière encadrée de végétation est un lieu de convivialité et de fête.
On retrouve enfin à Fléville toutes les facettes de l’art et de la beauté des jardins : grandes perspectives, jeu savant des dénivelés, allées somptueuses, miroirs d’eau, bosquets et futaies, labyrinthe, sans oublier l’île avec son joli pont Art Nouveau. Il y a de quoi respirer, se reposer, admirer et rêver au domaine de Fléville…
Cette semaine nous nous rendons à Rodemack, au Pays des Trois Frontières en Moselle afin d’arpenter les rues pavées de ce magnifique village médiévale. Lumière sur la « petite Carcassonne lorraine comme on l’a surnomme …
La petite Carcassonne lorraine
Rodemack s’est paré de ses plus beaux atouts pour ces fêtes de fin d’année, comme en témoigne, le Marché de Noël médiévale, qui trouve au cœur de cette charmante petite cité fortifiée lorraine nichée au creux d’un paysage de collines revêtues d’un léger manteau blanc, un écrin idéal.
Si le bourg fait partie du très convoité et fermé cercle des « plus beaux villages de France » depuis 1987, la beauté de cette paisible localité ne serait rien sans le travail de restauration et de mise en valeur mené depuis des dizaines d’années par l’Association des Amis des Vieilles Pierres pour la Sauvegarde de Rodemack. Depuis sa création, cette dernière a lancé moult chantiers d’insertion de jeunes bénévoles ayant permis la réhabilitation d’une grande partie des fortifications extérieures, des tours de flanquement, mais aussi des travaux intra-muros. De même, certaines rues ont été pavées, le vieux lavoir a retrouvé une toiture et un pont de pierre permet maintenant de franchir le ruisseau dont les berges ont été consolidées. A noter enfin que les travaux de reconstruction des courtines ont été complétés par un sentier piétonnier et par un véritable jardin médiéval. Et avec une hausse de la fréquentation touristes, résultant de la mise en valeur du village et des nombreuses manifestations médiévales et artistiques organisées tout au long de l’année, notamment la fameuse et désormais traditionnelle Fête Médiévale qui est une reconstitution complète du village au temps des chevaliers, c’est toute la citée fortifiée qui revit.
Ainsi, la construction de logements neufs par delà les remparts se multiplie. De même, un tissu commercial a été recrée avec une épicerie, deux restaurants, une pharmacie et un médecin. Rodemack propose un cadre de vie exceptionnel. La cité, encore entourée de plus de 700 mètres de remparts, présente en effet de nombreux attraits et charme le visiteur par ses ruelles typiques où l’on respire le parfum d’antan.
Parcourir le bourg, arpenter ses chemins secrets, c’est remonter le fil d’une histoire tumultueuse. Rodemack remonte au moins à l’époque gallo-romaine dans la mesure où les traces d’un ancien castellum ont été retrouvées à proximité, près de la voie romaine reliant Metz (Divodorum) à Trêves (Augusta Trevorum).Au début du IXe siècle, Louis le Pieux fit don de la localité à l’abbaye de Fulda en Allemagne. C’est en 1190 qu’Arnoux Ier usurpa les biens des abbés et fit construire un premier château féodal à l’emplacement de la forteresse actuelle. Ce seigneur reconnut comme suzerain, le Comte de Luxembourg. À partir de cette date, l’histoire du bourg changea radicalement. En effet, très vite les nouveaux seigneurs prirent une grande importance au niveau du comté du Luxembourg, dans la mesure où aimant guerroyer, ils augmentèrent rapidement leurs possessions. Leurs descendants successifs en firent de même, soit par alliances, soit par conquêtes, si bien qu’au paroxysme de leur puissance, la seigneurie s’étendit jusqu’aux frontières de Metz. Mais une alliance avec le roi de France ainsi qu’une forte rançon qu’ils durent acquitter précipitèrent leur déclin. En 1492, le dernier seigneur de Rodemack est déclaré félon. Tous ses biens furent confisqués pour être remis au Margrave de Bade, Christophe Ier, par l’empereur Maximilien d’Autriche. Ce changement de seigneurie amena à Rodemack de nombreuses vicissitudes au moment où le règne de Charles Quint allait bientôt débuter.
Ainsi, en 1542, une armée française commandée par Charles d’Orléans et Claude de Guise se rendit maître de la forteresse. Mais le traité de Crépy en 1544 rendit la cité à l’Espagne. En 1552, Rodemack tomba à nouveau pour quelques mois aux mains des Français. Ces deux évènements ne furent que le début d’une alternance de domination française et espagnole notamment, dictée par les sièges et les traités, qui s’acheva par la prise de contrôle de la cité par les Français, officiellement reconnue par le Traité de Versailles le 16 mai 1769. La cité fut par la suite relativement épargnée par les malheurs, en dehors d’un gigantesque incendie qui ravagea plus d’une centaine de maisons et granges. Ceci explique que la plupart des demeures anciennes du village datent du XVIIIe siècle.
Mais la position géographique de Rodemack ne favorisait pas à l’époque la tranquillité. Si bien qu’en 1792, le bruit des armes se fit à nouveau entendre et le bourg fut une nouvelle fois assiégé par des troupes ennemies venues en nombre, celles du Duc de Brunswick envahissant la France pour renverser la toute jeune nation révolutionnaire. La forteresse fit parler d’elle pour la dernière fois en 1815, au moment où les armées prussiennes qui en firent le siège durent se retirer après des pertes sévères infligées par la garnison forte de 500 hommes du général Hugo, le père du célèbre écrivain. Plusieurs monuments remarquables témoignent encore et toujours de ce passé mouvementé. Par exemple, la Maison des Baillis, parfois également nommée « Petit château », construite en 1560 par les Margraves de Bade, servait de résidence aux représentants des Seigneurs, que l’on appelait donc les Baillis.Transformée aujourd’hui en restaurant, on y trouve encore de magnifiques salons du XVIIIème siècle. Des bâtiments de l’ancien château féodal, il ne subsiste que les écuries, le puits et le magasin à poudre. Le Pavillon des Officiers fut quant à lui construit sur les ruines de l’ancien château féodal, dans la cour d’honneur. L’entrée de l’enceinte, construite aux XVIème et XVIIème siècles, se compose de trois tours: la « Tour Boncour », couverte d’une toiture, et les « Tours Jumelles » qui encadraient le pont-levis et donnaient accès à la citadelle. Cet ensemble était relié à une barbacane par un avant mur sur lequel était installé un second pont-levis. Le Pavillon des Officiers a été restauré au début de XXème siècle par la famille De Gargan, qui l’a acquis en 1869 et classé Monument Historique en 1981. Il est resté dans la famille jusqu’en 2003, année où la Communauté de Communes de Cattenom et Environs l’a acquis en vue d’en faire un lieu ouvert au public.
La Chapelle Notre Dame fut construite en 1658 par les habitants du village en remerciement à la Vierge, pour la fin de la guerre de Trente ans et des maux qui l’accompagnèrent: peste, disette et ruine. Il faut dire qu’à la fin de cette guerre, Rodemack ne comptait plus que 40 foyers au lieu de 110 comme en 1636. La légende attribue cependant sa construction au vœu d’un seigneur qui aurait échappé à ses poursuivants en effectuant un saut avec son cheval du haut du rocher où se trouve cette chapelle, ce qui lui sauva la vie. L’Eglise St Nicolas fut élevée un peu plus tard, en 1783, à l’emplacement d’une ancienne église romane érigée en 915. En effet, cette dernière, malgré des agrandissements successifs, ne pouvait plus contenir tous les paroissiens. Durant la révolution, cette église servit également de lieu de réunions électorales. Au cours de l’une d’entre elles, à l’occasion de l’élection du juge de paix du canton, un garde national fut tué et il y eu plusieurs autres blessés. Le culte fut alors interrompu dans l’église pendant près d’une année, puis elle fut à nouveau consacrée afin de pouvoir à nouveau y célébrer l’office. A l’intérieur, on trouve le monument funéraire de l’un des derniers seigneurs de Bade, Herman-Fortuné, ainsi que de sa femme Marie-Sidonie. Leurs statues sont toujours pieusement agenouillées devant un Christ baroque.
En outre, Rodemack est surtout connu pour sa fameuse Porte de Sierck, ainsi que pour les 700 mètres de remparts encore existants, qui ont été construits aux XIIIème et XIVème siècles par les habitants du bourg, après la signature de la charte les affranchissant. Deux portes donnaient accès au village, à l’Ouest, la Porte de Thionville, détruite au milieu du XIXème siècle, et à l’Est, la Porte de Sierck, défendue par deux tours rondes. Au Moyen Age, cette porte s’appelait « Porte de la Franchise ». Sur la partie extérieure de la tour couverte se trouve un cadran solaire privé de son style. Au milieu de l’arche, on remarque une statuette de Saint Roch.
Le Jardin Médiéval est devenu depuis sa création une autre curiosité incontournable de la cité fortifiée. Il s’agit d’une réplique des jardins réalisés selon un plan géométrique simple que l’on trouvait au Moyen Age. Ce jardin, surtout utilitaire, se compose de 4 espaces. Le premier espace est consacré aux plantes médicinales et renferme par exemple de l’absinthe (pour donner de l’appétit), du thym (antibiotique par excellence), de la verveine (qui chasse la fièvre) ou encore de la mélisse (calmante et antispasmodique). Le second espace présente les plantes condimentaires pour aromatiser et épicer la cuisine. Les légumes et plantes vivrières, comme le cardon (ancêtre de l’artichaut), l’oseille ou la menthe sont regroupées au sein d’un troisième espace. Enfin, dans un dernier espace se trouvent les fleurs et plantes d’ornement. Le lavoir complète enfin la palette des principaux monuments remarquables de Rodemack. Il fut encore en service dans les années 1960, mais est toujours alimenté par l’une des nombreuses sources qui émergent au pied du château. Devant l’entrée du lavoir se trouve un bildstock datant du XIème siècle. Des dix croix, dont six de type « Bildstock » (ou calvaire) qui sont recensées à Rodemack, il est probablement le plus ancien. La base du fût, rond, est du style gothique flamboyant des XVème et XVIème siècles. Le retable reprend la scène habituelle du Christ en croix, entouré de la Vierge Marie et de St Jean.
Tant de raisons font donc de la « petite Carcassonne lorraine » un site absolument remarquable et préservé, qui transporte les visiteurs dans l’univers fascinant et fabuleux de Moyen-Age. A DECOUVRIR ABSOLUMENT !
Reprise cette semaine de votre rubrique Lumière sur, où nous partons à la découverte du célèbre et emblématique Mont Saint-Quentin, poumon vert de l’aggloémaration messine.
Saint-Quentin : un mont comme symbole de toute une agglomération
Le Mont Saint-Quentin, point culminant du Pays Messin, attire l’Homme depuis des millénaires. Ce promontoire des Côtes de Moselle a de tout temps inspiré les passions et suscité les convoitises. Il a toujours constitué une position stratégique de la plus haute importance, permettant aux troupes de toutes les époques de contrôler Metz et sa périphérie.
La présence humaine y est attestée dès la Préhistoire. En effet, des outils datant d’au moins 5000 ans avant notre ère ont été retrouvés sur ses pentes. Le Mont Saint-Quentin est selon la légende, l’ancienne colline du Tignis Mons ou Mont des Charpentes, qui offrait jadis le bois nécessaire à de nombreux usages. Ce n’est qu’après le IXème siècle, lorsque les reliques de Saint-Quentin furent déposées à son sommet, dans une petite église, que le mont prit son nom actuel. La vigne, importée par les Romains, y prospérait autrefois. Des traces d’une telle culture remontent ainsi au IIème siècle. C’est cette même vigne qui fut chantée par le poète latin Ausone sur les bords de la Moselle. Elle fut ensuite l’activité des religieux. En effet, le plus ancien propriétaire du Mont n’était autre que l’Evêque de Metz. Le vin fit par la suite la richesse et la prospérité des Messins aux XIIème et XIIIème siècles. La vigne qui courrait sur les flancs du Saint-Quentin et dans la vallée fut presqu’entièrement anéantie par le phylloxéra au début du XXème siècle, avant d’entamée une renaissance depuis une dizaine d’années. Il faut donc imaginer qu’au moment de la construction des forts dès 1868, le haut du Mont n’était pas recouvert d’arbres mais de ceps et de quelques taillis. Mais depuis l’abandon des forts, la nature a repris le dessus et l’urbanisation grignoté quelques espaces.
Avec une telle histoire, il n’est pas étonnant que certaines associations s’inquiètent du projet d’aménagement touristique de la Communauté d’Agglomération de Metz Métropole (CA2M), dont les travaux préparatoires, à savoir débroussaillage et dépollution, viennent de débuter. Il faut en effet savoir que le site est à la fois classé, en tant que site historique et site Natura 2000, dans la mesure où il abrite des espèces protégées comme une vingtaine d’orchidées différentes des pelouses calcaires, des chauves-souris rares, la chouette hulotte ou le hibou moyen-duc. Aussi les associations craignent pour la conservation du riche patrimoine militaire du Mont, mais également d’autres éléments comme les ruines d’une maisonnette ayant appartenu à une élève de Laurent Maréchal, ou encore les quatre arbres de la Croix-Cueillat qui marquent l’emplacement où l’on brûlait autrefois les sorcières.
Aujourd’hui, comme nous l’avons précédemment évoqué ici et dans d’autres articles, le Mont Saint-Quentin, fait l’objet d’un ambitieux projet de mise en valeur touristique et de réaménagement de ses espaces boisés. Il s’agit d’in travail de longue haleine puisque la réalisation de ce projet s’étale sur les 15 voire les 20 prochaines années. La CA2M prévoit d’y injecter entre 15 et 24 millions d’euros. Les vocations du futur Mont Saint-Quentin sont de cinq ordres : tout d’abord un tourisme local pour les habitants de Metz et son agglomération, ensuite un tourisme plus large afin de permettre aux visiteurs de découvrir la vallée messine, une vocation pédagogique également pour rappeler le passé militaire de la ville, mais aussi une dimension écologique et sociale dans la mesure où des chantiers d’insertion seront menés. Il y a ainsi un énorme travail à fournir sur la pierre, la ferronnerie et l’aménagement des sentiers. L’idée d’un téléphérique est même avancée, dans l’optique d’éviter au maximum les voitures. D’autant plus que les traces d’un ancien funiculaire, partant du cinquième virage de la route touristique jusqu’au Fort Diou, ont été retrouvées.
Cependant, il va en outre falloir nettoyer et sécuriser l’environnement des bâtiments, assurer la mise en place des garde-corps et des ouvrages de sécurité (Fort Diou, Fort de Plappeville,…), le dégagement du Groupe Fortifié du Mont Saint-Quentin, la démolition des bâtiments dangereux, la consolidation de certains autres ouvrages ainsi que la mise en lumière des silhouettes du Fort Girardin et du Fort Diou. Le coût prévisionnel de cette phase s’élève à 7 millions d’euros. En effet, si le Saint-Quentin n’aurait pas été bombardé pendant la Première Guerre Mondiale, aucun obus de 14/18 n’a été retrouvé, les forts ont par contre subi des tirs d’artillerie pendant la Seconde Guerre Mondiale. Par la suite, une seconde tranche de travaux sera engagée. Celle-ci prévoit la création de nouveaux parcs de stationnement, de chemins complémentaires, de l’ouverture des enceintes fortifiées Diou et Plappeville, du balisage et de la signalisation des cheminements ainsi que des aménagements paysagers spécifiques. Le tout pour là aussi 7 millions d’euros.
Enfin, la réhabilitation et la consolidation des constructions altérées donneront au site une dimension touristique et culturelle pour une enveloppe prévisionnelle de 10 millions d’euros.
Histoire de ne pas oublier qu’il y a tout juste un siècle, Metz était la ville la plus fortifiée du monde et que c’est sur les flancs de ce mont, à Scy-Chazelle, village natale de Robert Schuman, que s’est construit l’Europe d’aujourd’hui.
La rubrique Lumière sur reprend du service avec une escapade très instructive à Montigny-lès-Metz.
Lumière sur les 200 ans de Montigny-lès-Metz
Cet été la troisième ville de Moselle a soufflé ses 200 bougies. La cité est née le 5 août 1809 par un décret de Napoléon Ier signé au château de Schönbrunn à Vienne. Ce dernier actait le rattachement des communes de Montigny et de Saint-Privat pour former Montigny-lès-Metz. Mais en réalité, la localité possède une histoire bien plus ancienne, qui remontent à l’époque romaine, puisque non loin de la Ferme de la Horgne se trouve une des nécropoles de l’antique Divodurum, c’est-à-dire l’actuelle ville de Metz. De toute cette histoire, il reste à Montigny-lès-Metz de magnifiques témoignages. Découvrez-les plus en détail.
De l’époque médiévale, la ville conserve les fermes fortifiées de la Horgne, de la Grange-le-Mercier et de Blory. Mais le plus ancien monument de Montigny est sans nul doute la chapelle Saint-Privat. La construction de cette dernière remonte au IXème siècle à l’époque de Charlemagne (ou de Pépin le Bref selon les sources). Les vestiges de cet édifice ont été mis à jour en 2006, au moment de la destruction d’un îlot vétuste de la rue du Général Franiatte. Admirablement restaurée par la municipalité, la petite chapelle est désormais ouverte aux visiteurs.
Mais le bâtiment le plus emblématique de la ville reste le château de Courcelles, dont le parc est aujourd’hui l’un des plus agréables de Montigny avec sa fontaine et ses sculptures. Le majestueux édifice date du XVIIème siècle et fut construit par Charles-Joseph de Courcelles, d’où le nom du château. Ce dernier a été restauré en 2003-2004, mêlant de manière audacieuse et gracieuse les parquets anciens, les plafonds et fenêtres majestueuses à des portes transparentes et des ascenseurs ultramodernes. Les vitraux du Temple protestant et de l’église Saint-Joseph méritent également un détour. Le visiteur peut d’ailleurs admirer au plafond de cette dernière le Graouilly.
De même, la ville abrite la maison du Général de Gaulles, dans le quartier très cossu de la Vacquinière. C’est l’une des très belles maisons du quartier. Charles de Gaulle a en effet habité cette majestueuse demeure au moment où il était colonel au 507ème Régiments de chars de combats. C’est de là qu’il partit en 1939 pour défendre puis libérer la France.
La ville abrite en outre la peintre et sculptrice Solange Bertrand, amie de Picasso, ainsi que le sculpteur Claude Goutin, Grand prix de Rome en 1956. En effet, Montigny est aussi une cité d’artistes. La ville possède à ce titre une galerie d’art contemporain, appelée Shimoni Gallery – Arts Gambetta. Créée en 1991 par Hervé Shimoni, cette dernière assure la promotion d’artistes contemporains.
Enfin que serait Montigny-lès-Metz, ville aux trois fleurs aux concours des villes et villages fleuris, sans le canal de Jouy et sa piscine. Mais la ville a perdu son grand bassin extérieur, qui faisait autrefois sa réputation nautique. Une étude a dernièrement démontré que les habitants souhaitaient vraiment profiter à nouveau d’un grand bassin extérieur. La municipalité affirme aujourd’hui avoir la volonté d’intervenir. Mais la simple réparation du grand bassin reviendrait à 5 millions d’euros, tandis que sa reconstruction complète en coûterait 12. La ville ne peut financer à elle seule un tel équipement. La communauté d’agglomération pourrait le faire, d’autant plus que la piscine est fréquentée à hauteur de 60% par des personnes ne résidents pas à Montigny.
Lumière sur les trésors de l’évêché de Metz
L’évêché de Metz se tient place Sainte-Glossinde, dans les bâtiments de l’ancienne abbaye du même nom. Celle-ci, construite au VIIème siècle, a été maintes et maintes fois remaniée. C’est ce qui explique les différents styles architecturaux que nous pouvons observer. Au final, ce que retiendra le visiteur, c’est l’impression d’un labyrinthe, d’un véritable dédale lumineux et spirituel. Les différents bâtiments s’emboîtent en effet les uns dans les autres. Derrière les cours, se cachent des jardins secrets et bien entretenus. Tout est de même taillé pour attendre les cieux. Après avoir dressé ce bref portrait de l’évêché et de son contexte, partons à la découverte de ses trésors.
A l’étage, ce dernier recèle une magnifique toile qui orne le couloir d’accès aux bureaux administratifs. Avant, c’était là que les sœurs avaient leurs cellules. La peinture, dont l’auteur nous est inconnu, date du XVIIème siècle. On peut y apercevoir Saint-Clément et le Graouilly. La scène se passe au col de la croix Saint-Clément. En s’approchant lentement du tableau, on y voit de gros navires remontant la Seille, qui était certainement bien plus large qu’aujourd’hui. Outre ses cours et son cloître, l’évêché abrite la salle du tribunal ecclésiastique, renommée officialité, censée trancher les litiges entre membres de l’Eglise. Cette salle renferme de bien belles boiseries, malheureusement en triste état. Si le pilier central présente encore son doré, deux demi-lunes peintes ont été récupérées par les Monuments Historiques afin d’être étudiées.
Enfin, dans la cour principale, on peut apercevoir un mur et un vitrail de la chapelle Sainte-Gengoulf. Mais le trésor incontestable de l’évêché de Metz reste la chapelle Sainte-Glossinde, exemple unique d’édifice rococo dans la cité trois fois millénaire. Sa nef, très courte, était réservée aux moniales. Le transept accueillait quant à lui les laïcs. Le décor sculpté est très raffiné. L’œuvre la plus remarquable de la chapelle est sans nul doute la fresque de la coupole peinte par Girardet, artiste au service du Stanislas. Malheureusement, là aussi, la coupole et ses peintures ont besoin d’être restaurées d’urgence. Comme partout, l’argent manque. A noter que le mobilier, à savoir, autel, baldaquins, confessionnaux, statues,… est tout aussi remarquable. On peut de même encore lire les épitaphes funéraires de 14 religieuses dans la crypte. Une partie des caves est de même constituée de cryptoportiques gallo-romains. Ces derniers ont certainement servis d’entrepôt. L’autre partie a été aménagée comme abris durant la Seconde Guerre Mondiale.
Vous devez être connecté pour rédiger un commentaire.