Le Groupe BLE Lorraine ouvre une nouvelle rubrique intitulée « C’était hier en Lorraine », afin de retracer certains des grands évènements de l’histoire moderne de notre belle province. Elle sera régulièrement mise à jour et complétée de nouvelles découvertes. Un formidable voyage à travers le temps et l’Histoire …
Témoins de la Ligne Siegfried en Moselle
Si beaucoup de personnes connaissant la célèbre Ligne de Maginot, à savoir cette série d’ouvrages fortifiés, de trouées et de zones inondables dressée face à l’Allemagne, dont les plus beaux ouvrages peuvent se visiter en Moselle, du côté du Hackenberg à Veckring, plus gros ouvrage et fort le plus puissant de toute la Ligne, ou encore du Simserhof dans le Bitcherland, peu de gens ont déjà entendu parler de la Ligne Siegfried, penchant de la Ligne Maginot côté allemand, dont quelques vestiges peuvent encore être observés en Lorraine à Spicheren et à proximité de Forbach. Revenons plus en détail sur la construction de cette fortification du XXème siècle.
Alors que tout semblait figé dans cette « drôle de guerre », cette « Sitzkrieg », où l’on s’observait surtout de part et d’autre de la frontière, un linceul de neige recouvrait le paysage, ainsi que les villes et les villages abandonnés depuis l’exode des Mosellans en septembre 1939. Les provocations, l’intox et l’espionnite régnaient cela dit déjà avant la déclaration de guerre. La fuite forcée de la population fut d’ailleurs l’occasion pour l’armée française de procéder à des pillages, ce qui lui coûtera, comme nous allons le voir, des vies humaines. L’opération lancée le 6 décembre en direction de la Ligne Siegfried fut un désastre. Les forêts et les communes du massif du Warndt furent rapidement investies, mais au prix de sérieuses pertes, en raison des nombreux pièges et des mines déposées par les Allemands. Les soldats français entraient ainsi dans les maisons, voyaient un portrait d’Hitler, le retiraient et une mine sautait aussitôt. Table, cadavre de poule, tout était relié à des mines !
Le 24 décembre fut choisi par le Führer pour venir une nouvelle fois visiter en personne les travaux de la Ligne Siegfried. Cette ceinture de fortifications avait été conçue selon les plans d’un nouveau système de défense imaginé par des membres de l’Etat-major à la suite de l’abandon par les troupes françaises de ce secteur frontalier au début de mois de novembre 1939. Ce nouveau dispositif prévoyait ainsi la construction de plus de 60 casemates et bunkers en Moselle, entre Spicheren et Grande-Rosselle en passant par Stiring-Wendel. La réalisation de cette ligne supplémentaire projetée devant Sarrebruck fut finalement donnée le 11 janvier 1940. Ces casemates, qui furent construites selon des règles et des modèles bien précis, jalonnent encore aujourd’hui et en grand nombre le haut et les flancs de la colline de Spicheren, de Forbach et du Kreuzberg. A Stiring et à Vielle Verrerie, certains de ces ouvrages militaires ont été incorporés dans des constructions ou des aménagements plus récents.
Véritables témoins cette période de troubles, tout comme cette tombe de soldat sur la route de Spicheren, ils constituent autant des curiosités pour le visiteur qui sait y prêter attention …
(Source : presse régionale)
Le secret des entrailles de Wittring
De 1943 à 1944, les Allemands menèrent des activités ultrasecrètes dans la carrière souterraine de Writting, près de Sarreguemines. Pourtant, le site fut d’abord une carrière à ciel ouvert d’exploitation de pierre calcaire. Le premier tunnel y a été foré pendant la première annexion au Reich en 1896. Cette activité d’extraction destinée à la sidérurgie se poursuivit dans la partie Nord des souterrains. La partie Sud de ces derniers abrita une champignonnière en 1942. Mais le producteur fut sommé par l’armée allemande de libérer les lieux en octobre 1943. La production de champignons ne reprit qu’au début des années 1970, avant de s’achever il y a seulement quelques années.
L’arrivée des Allemands perturba donc la quiétude de ce village de 800 âmes. En l’espace de quelques mois, les activités ultrasecrètes drainèrent 8 000 personnes ! Principalement des militaires de la Wehrmacht, des édiles du parti national-socialiste ou encore du personnel civil. Ils venaient à 90 % du Nord de l’Allemagne. Les Sarrois étaient donc même tenus à l’écart de cette usine ! On retrouvait partout des baraquements pour les civils. De même, de nombreux prisonniers de guerre y travaillèrent, dont 1 800 Italiens qui s’étaient dressés contre le régime de Mussolini. Ceux-ci étaient logés à fond de cale dans des péniches sur la Sarre. Un millier de Russes étaient également présents. Ils dormaient l’hiver sous des tentes sans feux sur les hauteurs. Une question hantait cependant les habitants. Mais que pouvaient bien produire ici les Nazis ?
Le site était classé « propriété directe de l’armée ». Très peu d’entreprises d’armement disposèrent d’une telle qualification. Il s’agissait en réalité de la plus importante unité de production d’oxygène liquide en sous-terrain du IIIème Reich. C’est pourquoi celle-ci était immédiatement placée sous le commandement d’Albert Speer, ministre de l’armement et des munitions, et bras-droit d’Hitler. La production de ce composé se trouvait essentiellement dans la partie Sud des souterrains, parfois jusqu’à 50 mètres sous la surface, une épaisseur qui permettait de protéger les galeries. L’oxygène liquide était ensuite acheminé vers le centre de tir de Peenemünde, aux Pays-Bas. Il servait à la propulsion des fusées V1 et V2. Il y avait un accès par voie de chemin de fer, mais le site lorrain était hermétiquement fermé. Les wagons ne sortaient que la nuit. Les habitants de Wittring les appelaient les « trains fantômes ». Partout dans le village annexé, il y avait des affiches en allemand qui rappelaient que « l’ennemi vous écoute ». Un sentiment de peur était ainsi volontairement entretenu pour tenir la population à l’écart de ces activités militaires. A noter que les 30 à 35 km de galeries abritèrent également la fabrication des fameux moteurs Bayerische Motorenwerke (BMW) destinés aux avions de la Luftwaffe. Bien que les alliés aient apparemment eu connaissance de l’existence de ces usines, ces dernières, aux noms de code évocateurs (Kalk I et II), ne furent que très peu bombardées.
En raison de toute cette histoire, le site, aujourd’hui fermé, mériterait amplement d’être ouvert aux visiteurs et au tourisme. A bon entendeur.
(Source : presse régionale)
Retour sur la ratonnade du 24 juillet 1961
Si l’est une page bien sombre de l’Histoire contemporaine de la ville de Metz après la Seconde Guerre Mondiale, c’est bien celle de la nuit du 24 au 25 juillet 1961. Ce qui s’est produit passerait presque inaperçu des jeunes générations tant ces évènements restent encore méconnus. Ils ont pourtant fait quatre morts et des dizaines de blessés. Alors que le 22 juillet 1961, des paras abattent deux Algériens en plein centre-ville de Nancy, c’est le 24 au soir que tout va commencer dans l’agglomération messine, et plus précisément dans un café-dancing réputé de la rue de Pont-à-Mousson à Montigny-lès-Metz appelé le Trianon. C’est là que se trouvent près d’une soixantaine de militaires récemment stationnés en garnison de Metz, au 1er Régiment de Chasseurs Parachutistes et au Quartier Serré de Moulins-lès-Metz. Un commando algérien mitraille alors la façade du Trianon. Un barman ainsi que deux paras, dont un appelé, sont tués. Apparemment pour une histoire de femme. Mais l’origine nord-africaine des agresseurs provoque immédiatement un désir de vengeance. Aussitôt les portes des casernes s’ouvrent et quelques 200 paras décident de mener une expédition punitive à travers la ville. Les bars du quartier impérial sont littéralement la proie à un déferlement d’une violence inouïe. Un climat de guerre civile règne un peu partout en ville. Le lendemain matin, une atmosphère de désolation s’est emparée de Metz. Le célèbre buffet de la gare a été dévasté, tout comme le quartier du Pontiffroy. Le bilan officiel fait état de 4 morts et de 27 blessés. Mais le doute plane toujours sur le nombre exact de nord-africains tués. Plusieurs témoins affirmèrent que des Algériens auraient été jetés dans la Moselle cette nuit-là. Le mystère de ces sombres heures demeure encore …
(Source : presse régionale)
L’Histoire refait surface à Lubey
Le crash d’un appareil de la Luftwaffe, qui a frappé le cœur du village de Lubey le mercredi 8 novembre 1939, n’a pas encore effacé des mémoires les stigmates de ce qui fut appelé la « drôle de guerre. Retour sur une journée en enfer dans ce coin de Lorraine.
Depuis le 3 septembre 1939, date de la déclaration de guerre, des appareils de reconnaissance allemands survolent le territoire français, afin de collecter un maximum de renseignements sur les terrains d’aviation et les bases militaires. Le « Crayon Volant », un Dornier DO 17 P allemand destiné à l’origine au transport de passagers mais transformé par la suite en bombardier rapide ou en appareil de reconnaissance, s’était infiltré en début de cette matinée de Thionville en direction de la région parisienne. Il volait à environ 9 000 mètres d’altitude. Le rôle d’un tel appareil était de prendre des photographies de tous les ponts, routes et bâtiments juste avant l’attaque des Allemands. Repéré par les postes d’écoute, il est attendu au retour. Il fut ainsi intercepté par des pilotes du 13ème Squadron de la Royal Air Force (RAF), basé à Rouvres-en-Woëvre. Le pilote néo-zélandais Edgar James Kain eut l’honneur de l’abattre. Des trois membres d’équipage de la Luftwaffe, un seul pourra être identifié. Les malheureux occupants du « Crayon Volant » furent littéralement déchiquetés, leurs corps pulvérisés. A 10h15, le centre de la rue principale de Lubey offre un bien terrible spectacle d’apocalypse. Un villageois s’appliqua à réunir les restes des militaires allemands dans deux lessiveuses. Le maire de l’époque, eut alors la sagesse d’offrir une sépulture décente dans le cimetière communal au pilote, l’Oberleutnant Kutter, à l’observateur l’Oberfelwebel Stuhler, et au mitrailleur arrière, l’Obergefreiter Scheidmüller. La Wehrmacht procéda au rapatriement des dépouilles durant l’Occupation. Lubey marqua la première des 17 victoires du jeune Kain, né le 27 juin 1918 à Hastings, en Nouvelle-Zélande, qui devint une véritable légende dans son pays. Il accumula en effet les exploits à bord de son Hawker Hurricane durant la Bataille de France, si bien qu’il fut décoré à 21 ans de la Distinguish Flying Cross. Malheureusement pour lui, l’as de la RAF périt, à l’âge de 22 ans, le 7 juin 1940, lors d’une démonstration d’acrobatie sur l’aérodrome civil d’Echemines dans l’Aube. La sépulture de celui qu’on dénommait « Cobber » se trouve encore aujourd’hui au cimetière canadien de la Royal Air Force de Choloy-Ménillot, près de Toul.
Une équipe de la BBC, accompagnée de Peter Ayerst qui est aujourd’hui le dernier pilote encore en vie du 73ème Squadron ayant côtoyé Cobber Kain, s’est dernièrement rendue à Lubey, afin de tourner un documentaire sur la Seconde Guerre Mondiale. A cette occasion, des fouilles, sur une surface de plus de 24 mètres carrés et une profondeur d’1,50 mètre, ont été entreprises par des archéologues spécialisés sous la route pour retrouver les restes de l’avion allemand abattu en 1939. D’ailleurs, la façade du numéro 22 de la rue de Verdun garde l’un des derniers stigmates encore visibles du crash. Une partie de l’avion l’a en effet percuté avant de s’écraser. L’endroit précis du crash avait ainsi pu être localisé grâce à des photos anciennes. En 1939, après le drame, seuls les gros morceaux avaient été déblayés, laissant entrevoir la possibilité de retrouver des débris à quelques mètres sous terre. Et c’est ce qu’il arriva. Divers petits morceaux de moteur tordus, ainsi que de nombreux câbles ont été découverts, tout comme des éléments plus conséquent de l’appareil. Une balle gravée de la date 1938 a même été dégagée.
Le documentaire, qui comportera trois parties, devrait être diffusé sur la BBC durant l’été 2010, afin de commémorer le 70ème anniversaire de la bataille d’Angleterre.
(Source : presse régionale)
Mémoire mosellane à Sarreguemines
Une journée dédiée à la mémoire mosellane s’est dernièrement déroulée à Sarreguemines. Elle visait cette année à commémorer l’évacuation forcée des populations de la « zone rouge », il y a 70 ans, en évoquant et présentant les conséquences singulières et bien souvent méconnues de la Seconde Guerre Mondiale en Lorraine. En effet, le 1er septembre 1939, tous les habitants de la « zone rouge », une bande d’une dizaine de kilomètres de large située entre la frontière et la Ligne Maginot, sont contraints de partir en l’espace de quelques heures seulement. Ils n’ont le droit que d’emporter 30 kg chacun. Le reste est abandonné aux troupes françaises qui pillent les maisons. Cette histoire dans sa réalité complexe et tragique ne figure pas, pensez-vous, dans les manuels scolaires. L’objectif de l’organisation d’une telle journée est ainsi de préserver ce patrimoine de mémoire et d’en assurer la transmission aux nouvelles générations. Avec le déclenchement de la bataille de France après la période de « drôle de guerre », un second exode massif de population intervint le 10 mai 1940. Au total, ce sont plus de 300 000 des 650 000 Mosellans qui sont déplacés sur plusieurs mois, essentiellement vers la Charente-Maritime et la Vienne. Ce transfert de plusieurs jours s’effectua à pied, sur des chariots ou même … dans des wagons à bestiaux ! Tiens, ça ne vous évoque rien ? Rappelons que depuis le conflit de 1870, les populations locales ont subi deux annexions allemandes et cinq changements de nationalité. Ces bouleversements ont ainsi profondément marqué leur identité. A noter enfin que l’édition 2010 de la Journée de la mémoire mosellane, prévue à Château-Salins, portera sur l’épisode lui aussi douloureux des expulsions effectuées par les Allemands après septembre 1940.
(Source : presse régionale)
C’était hier en Lorraine : la Bataille de la Moselle
Retournons entre le 8 et le 10 septembre 1944 à Dornot et Corny-sur-Moselle, où s’est déroulée une véritable tragédie de guerre, dont on a fêté cette année la65èmeannée anniversaire.
Alors que le 1er septembre, la IIIème armée américaine commandée par le général Patton est pratiquement immobilisée en Lorraine, en raison d’un problème de ravitaillement, autour et dans Metz c’est l’effervescence et le désordre. Si le manque de carburant est résolu le 4 septembre, les forces allemandes ont profité de cette incroyable panne américaine pour se réorganiser et s’opposer à l’avancée de Patton. Ce dernier a prévu de traverser la Moselle à son endroit le moins large, autrement dit à Dornot. Le 7 septembre, une multitude de véhicules, dont de nombreux blindés de la 7ème Armored US, encombrent les rues de village des côtés de Moselle. Le reste des forces terrestres tentent de s’enfiler à travers ce véritable enchevêtrement dans la rue principale. L’extrême urgence de la situation pousse les Américains à traverser le fleuve le lendemain, sans préparation suffisante. Le flou artistique des ordres de l’Etat-major n’arrangera rien à la situation. Les troupes ont pour mission d’enjamber les voies de chemins de fer, de traverser la Moselle en bateau, de contourner l’étang et d’atteindre le sommet des deux collines faisant face à Dornot, qui abritent deux fortins allemands bien camouflés, à savoir les ouvrages de Saint-Blaise et du Sommy. Au prix de lourdes pertes, plusieurs compagnies parviennent à atteindre la rive droite de la Moselle et quelques GIs prennent même possession du bois du Fer à Cheval. Mais la situation se complique très sérieusement au pied du fort Saint-Blaise, au moment où les Américains doivent se replier alors que les Allemands contre-attaquent. Cette offensive allemande marqua alors le début de la dramatique histoire de la tête de pont de Dornot. Les Américains passèrent une bonne soixantaine d’heures dans le bois, subissant, terrés, un bombardement intense et interrompu, tentant de repousser d’incessantes vagues d’assaut lancées en particulier par des éléments de 17ème SS Panzer Grenadier. Durant ces trois jours, le second bataillon du 11ème Régiment d’infanterie US est sacrifié sur la rive droite, dans la mesure où il devait tenir coûte que coûte la tête de pont, afin de détourner l’attention des Allemands. En effet, le 10 septembre, un nouveau franchissement est en passe de réussir plus au Sud au niveau d’Arnaville. Le 11 septembre 1944, le 2nd bataillon du 11ème Régiment d’infanterie US a virtuellement cessé d’exister. Seuls quelques survivants ont pu par la suite témoigner de son héroïque épopée et de la violence des combats. C’est le cas de Kelley B. Lemmon, aujourd’hui âgé de 97 ans, qui était lieutenant-colonel lorsqu’il commandait le 2nd bataillon à Dornot et qui est dernièrement retourné en Moselle pour planter un « arbre de la liberté » aux jardins fruitiers de Laquenexy. Tout un symbole. L’échec de la tête du pont et la bataille du bois du Fer à Cheval ont fait près de 1 000 morts côté américain, autant d’hommes qui ont été sacrifiés afin que d’autres puissent traverser la Moselle au niveau d’Arnaville.
L’année prochaine, un sentier de la mémoire sera inauguré entre Dornot et Corny-sur-Moselle par l’association Thanks GIs. Cette dernière a également pour projet d’implanter une grande statue commémorative à proximité de l’étang, ainsi que de construire, si les finances le permettent, un musée consacré à la Bataille de la Moselle. Cette dernière a commencé ici en septembre 1944 avant de s’achever en mars 1945 du côté de Bitche. Même la Bataille de Normandie a été plus courte …
(Source : presse régionale)
Quand la mine devenait une usine à V1 …
Tout commence en 1882, date à laquelle remonte la concession minière du Tiercelet, devenue peu de temps après mine du Syndicat et dont le minerai était reconnu comme étant de bonne qualité. La zone d’exploitation, d’une superficie de 769 hectares, s’étendait sous les communes de Hussigny, Thil, Villers-la-Montagne, Morfontaine et Bréhain-la-Ville. Cela dit, la Seconde Guerre Mondiale allait radicalement changer le destin de cette mine. En effet, cette dernière vit en 1942, sombre époque où la Lorraine était déchirée une nouvelle fois, les prémices d’une activité souterraine militaire ultra-secrète. Les premiers contingents du IIIème Reich furent dès lors remplacés par des SS qui étaient chargés de surveiller les prisonniers entassés dans des baraquements. Thil devint ainsi une plaque tournante pour les déportés politiques et les juifs des Pays de l’Est. Profitant des conditions techniques et de stockage de la mine du Tiercelet, les Nazis passèrent à une production intensive de fusées V1 de 1943 à 1944. Les prisonniers construisirent à cette fin, dans la mine du Tiercelet, à plus de 100 mètres sous terre, une véritable usine de fusées V1. Ces dernières eurent ici une envergure de 5 mètres, pour une longueur de 8 mètres et un poids total de 2 tonnes, dont environ 600 kg de carburant ainsi qu’une tonne d’explosif. Leur portée maximale fut poussée jusqu’à 400 km, ce qui signifie que Paris pouvait être atteint à partir du site lorrain, tout comme l’était déjà Londres à partir des bases à V1 néerlandaises. Pour la construction et l’installation de l’usine du Pays Haut, l’Organisation TODT fit acheminer 7 grands transports de machines à outil d’Allemagne mais aussi de l’usine Peugeot de Montbéliard. A noter qu’outre la production de fusée V1, l’usine fut complétée pour la conception d’éléments du tout nouvel avion de chasse Focke Wolf 154. Pour faire face aux besoins de fabrication, les prisonniers durent effectuer les trois postes jusqu’à finir par coucher sur place. Les plus récalcitrants d’entre eux furent envoyés au camp de Thil, dénommé par ailleurs « Camp de travail Erz ». Les voûtes, hautes de 7 mètres, permettaient le stockage du matériel et même l’arrivée d’une future ligne directe de chemin de fer.
A la libération de la mine du Tiercelet, de Thil et des villages environnants, une partie du matériel fut saisie par les Américains. On raconte même que des têtes de fusées furent transformées pour un usage domestique, comme à Hussigny-Godbrange, où un habitant s’en est servi pour en faire une hotte de cuisine. Après la guerre, l’exploitation minière prit fin en 1965. Le maire de Thil, espère toujours pouvoir rouvrir la mine historique afin d’en faire un sanctuaire et des visites guidées, à l’instar du Camp de Thil. La crypte est quant à elle déjà visitable. Une histoire hors du commun, à n’en pas douter …
C’était pourtant un exemple de sécurité …
A l’instar de la plupart des autres carreaux du secteur, la mine de Piennes ne portait pas le nom de la commune où se trouvait son siège d’extraction. Non, celle que l’on appelait aussi « mine du Nord-Est » se trouvait à Joudreville. Mais aujourd’hui, mis à part une vieille maison masquée par les arbres, il ne reste plus rien de l’exploitation. La nature a en effet repris ses droits sur cette friche industrielle. En contemplant toute cette verdure, on peine même à imaginer qu’il y avait une activité sidérurgique qui compta jusqu’à 1 100 mineurs dans les années 1955-1960 ! Cette mine fut en tout cas un exemple du point de vue de la sécurité. Du moins à partir des années 1970. La mine de Piennes a ainsi remporté en 1971 le 1er prix « d’amélioration du taux de gravité du concours annuel de Sécurité », organisé par la Chambre syndicale des mines de fer de France. Pourtant ses efforts sur la sécurité des mineurs ne l’ont malheureusement pas empêché de disparaître, puisque le carreau ferma en 1984.
Aujourd’hui encore, certains mineurs n’ont pas de mots assez durs pour déplorer la fermeture de la mine, ainsi que le démantèlement des concessions alentour.
Retour sur l’Exposition internationale de Nancy en 1909
Six mois de festivités, plus de deux millions de visiteurs : l’Exposition internationale de l’Est de la France qui se tint dans la cité ducale du 1er mai au 31 octobre 1909 au Parc Sainte-Marie et à l’Esplanade Blandan fut un véritable succès. Cette année là, tout le monde de l’industrie et celui des arts se sont présentés sous leurs plus beaux atouts …
Pourtant le contexte de l’époque n’était guère à la réjouissance dans cette Lorraine déchirée en deux. Mais l’ambition n’en était pas moins grande. En effet, alors que la Moselle avait été annexée par le Reich allemand après la guerre de 1870-1871, il s’agissait de présenter une vitrine de la vitalité et du progrès des provinces de l’Est face à une Allemagne perçue comme arrogante et volontiers conquérante. Sur les deux millions de visiteurs, la seule journée du 17 octobre en attira plus de 53 000. Ce jour avait ainsi été décrété « Journée des Messins ». D’ailleurs, plusieurs centaines d’entre eux arrivèrent la veille. Ils bénéficiaient d’un prix d’entrée exceptionnellement abaissé à 25 centimes. Un grand moment de l’histoire lorraine encore aujourd’hui méconnu. Près d’un demi-siècle après une exposition internationale similaire qui s’était tenue à Metz en 1861, il était indispensable de montrer les progrès considérables réalisés par l’industrie depuis une génération à Nancy et dans les départements limitrophes.
Pour que cette exposition soit grandiose et marque la mémoire collective, un chantier exceptionnel démarra au cours de l’été 1908 afin de bâtir les six palais qui devaient abriter la métallurgie, l’électricité, le textile, les arts libéraux, l’alimentation et les transports. Ces palais étaient de formes et de grandeurs inégales, ce qui permit à chaque architecte d’oser une certaine originalité. Ils encadraient le palais des Fêtes et s’ouvraient au centre sur un jardin à la française dont les couleurs vives tranchaient avec la blancheur des façades. Ce palais des Fêtes, avec son dôme culminant à 35 mètres de haut, abrita une quarantaine de congrès durant l’exposition internationale. Cette dernière fut ainsi le théâtre de nombreuses réjouissances : congrès, festivités anglaises, belges, compétitions sportives, fêtes des fleurs, de la vigne et du houblon, cortège historique rappelant les heures glorieuses de la Lorraine … L’Ecole de Nancy fut bien entendu mis à l’honneur et eu droit à son pavillon où furent célébrés Majorelle, Prouvé, Daum, Gruber et Vallin. La nouvelle Ecole des Beaux-arts, dont les travaux avaient débutés en 1906, accueillit quant à elle des expositions de peinture et de sculpture. Les villes d’eaux vosgiennes comme Vittel et Contrexéville, les Eaux et Forêts, les désormais défunts Magasins Réunis, la Collectivité du gaz ou encore Saint-Gobain disposaient également d’un pavillon à proximité d’attractions foraines, de restaurants et de kiosques. Mais outre les perles lorraines, le pavillon colonial et le village sénégalais qui sera ensuite présenté dans différentes villes en France, le village alsacien se distingua particulièrement. En effet, une maison typique avait été reconstruite sur place. Et à la différence de tous les autres édifices malheureusement voués à être démolis, cette maison alsacienne demeure encore aujourd’hui le seul et unique vestige de l’Exposition internationale de Nancy. Dès la fin de celle-ci, les démolisseurs se mirent à l’œuvre, tournant ainsi l’une des pages les plus exotiques de notre Lorraine.
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