L’usine Safran-Albany de Commercy a dernièrement été inaugurée. Après l’échec du Skylander, cette dernière doit donner des ailes à la filière aéronautique lorraine et contribuer à changer l’image de notre pays.
L’usine Safran-Albany de Commercy fabrique des pièces maîtresses des réacteurs LEAP qui équiperont les avions de nouvelle génération (Crédits photo : Safran)
Présent en Lorraine au tout début de son aventure, le secteur aéronautique l’avait quittée pour d’éminentes raisons stratégiques, du fait de sa proximité avec l’Allemagne, alors ennemi héréditaire de la France, puis du contexte de la Guerre Froide. La filière s’est ensuite redéveloppée en Lorraine à partir des années 1970-1980, au moment où les entreprises métallurgiques et mécaniques ont cherché de nouveaux débouchés pour faire face au déclin de la sidérurgie. De nos jours, l’implantation de Safran-Albany doit servir de locomotive en entraînant dans son sillage plusieurs sous-traitants. 400 emplois directs sont attendus à Commercy d’ici 2018.
L’usine s’étend sur 27 000 mètres carrés au-dessus du Quartier Oudinot, déserté par les soldats du 8ème Régiment d’Artillerie en juin 2013. En partenariat avec l’américain Albany, Safran fabrique en Meuse des aubes et des carters pour les moteurs LEAP (Leading Edge Aviation Propulsion), destinés aux avions de nouvelle génération, grâce à la technologie innovante du tissage en trois dimensions des fibres composites. 18 aubes et un carter composent l’entrée de ces réacteurs. La technologie LEAP permet de diviser par deux le bruit des moteurs et de gagner près de 500 kg par avion, réduisant ainsi la consommation de kérosène de 15 % par passager et par kilomètre. Pour y parvenir, le titane utilisé a été remplacé par des matériaux composites. L’air entre à la vitesse du son grâce à celle du ventilateur. La forme tridimensionnelle et l’épaisseur inégale des aubes leur permettent de supporter les charges. Plus légers, les matériaux composites tissés offrent également une très grande résistance aux chocs (pluie, grêle, oiseaux, etc.), aux corps étrangers, aux vibrations et à la vitesse de rotation.
Safran a une grande expérience dans les matériaux composites. Le groupe aéronautique et de défense a par ailleurs développé une activité de tissage pour les tuyères de la fusée Ariane et les freins en carbone des avions. Il s’est néanmoins associé à Albany, spécialiste du tissage, afin de réaliser les moteurs LEAP. L’entreprise américaine conçoit les carters et les aubes qui comptent parmi les pièces mécaniques les difficiles à réaliser. Sept kilomètres de fibre de carbone sont nécessaires pour tisser ce qui ressemble tout d’abord à une pièce de tissu noir grossier. Celle-ci est ensuite découpée aux dimensions de la future pale par un jet d’eau ultra-puissant, de la finesse d’un cheveu. Elle acquiert sa forme définitive après avoir été placée dans un moule, injectée de résine, mise sous presse et cuite dans un four. Elle est alors transférée dans la partie Safran de l’usine de Commercy, où des traitements lui sont appliqués. L’absence de défaut y est également contrôlée par des tests laser, scanner et ultra-sons, avant qu’un bord d’attaque en titane et un pied de fixation ne lui soient ajoutés.
Le site lorrain est en train de devenir un lieu stratégique pour l’aéronautique mondiale. Avec l’usine jumelle de Rochester aux Etats-Unis, il est l’un des deux endroits de la planète d’où sortent des pièces maîtresses du nouveau moteur LEAP. A l’horizon 2020, 50 aubes et 3 carters devraient sortir chaque jour de l’usine de Commercy pour rejoindre les sites d’assemblage de Safran-Snecma et de General Electric. 840 moteurs pourront alors être produits par an. Aujourd’hui, près de 8 000 moteurs LEAP ont d’ores et déjà été commandés pour équiper les Airbus A320 NEO, Boeing 737 Max et les appareils du chinois COMAC. Grâce à sa configuration, le site lorrain est prêt pour une extension si nécessaire.
Groupe BLE Lorraine
14 octobre, 2015 à 22:23
Il suffit de déplier une carte pour voir le grand blanc que constitue dans l’Est l’absence des industries de défense. Lorsqu’on sait le prix payé par la Lorraine à l’Histoire récente, ce n’est pas acceptable. L’arrivée de Safran à Commercy constitue un bon exemple de l’implantation d’une industrie de défense susceptible de compenser les pertes provoquées par les iniques et odieuses restructurations militaires.