Le Projet ULCOS, sur lequel le site intégré de Hayange-Florange fondait tous ses espoirs, a été remisé au placard. La Commission Européenne a en effet annoncé début décembre qu’ArcelorMittal avait retiré une première version d’ULCOS d’un appel d’offre pour obtenir des financements communautaires. Le groupe financier a évoqué des problèmes techniques, ainsi que des difficultés concernant la capture des gaz à recycler sur le haut-fourneau et sur le stockage. Néanmoins, Mittal et l’Etat français se sont déclarés prêts à investir dans une nouvelle version, plus aboutie, qui pourra au mieux être soumise à un nouvel appel d’offres programmé au second semestre 2013. Le centre de recherches de Maizières-lès-Metz sera missionné, afin d’apporter les améliorations techniques qui feront d’ULCOS 2 un projet viable. Mais une telle annonce, à quelques jours seulement d’un soutien européen qui promettait d’être favorable, suscite forcément des interrogations.
Les hauts-fourneaux lorrains doivent être repris (Crédits photo : Groupe BLE Lorraine)
Selon le gouvernement français, le retrait du projet était prévu dans l’accord passé avec Mittal, alors même qu’il avait été présenté comme l’une des contreparties obtenues dans son bras de fer avec le géant indien. Le compromis prévoit de même que les installations de la filière liquide, notamment les hauts fourneaux, ne soient pas démontés pendant six ans mais mises sous cocon. Paris continuera à soutenir et à accompagner ce projet, grâce aux 150 millions d’euros programmés par les investissements d’avenir. L’objectif reste de réaliser un démonstrateur industriel. Cela dit, rien ne garantit désormais que ce démonstrateur soit bien implanté à Hayange-Florange. Tout le monde s’était pourtant accordé à dire qu’ULCOS devait faire du site intégré mosellan une vitrine des nouvelles technologies de production de d’acier moins polluantes.
Rappelons qu’ArcelorMittal est engagé depuis 2004 dans le Projet ULCOS. Porté par un consortium de 48 entreprises de l’Union Européenne (UE), il vise à construire un prototype de haut fourneau innovant. Sa date de réalisation, initialement annoncée pour 2016, reste en réalité plus qu’incertaine.
Mais ce ne sont pas des problèmes techniques qui ont motivé la décision de Mittal. D’ailleurs, un commissaire européen chargé du dossier a reconnu « n’avoir jamais eu vent d’un problème technique sur ULCOS ». Près de dix millions d’euros ont été dépensés pour faire travailler une équipe d’ingénieurs de Maizières-lès-Metz sur le projet. Ces derniers sont parvenus à achever leurs études sur la configuration du haut-fourneau P6 en mode ULCOS. Le travail était fait. Des tests devaient être réalisés sur le réfractaire pour le passage du monoxyde de carbone à haute température. Pour cela, des travaux étaient nécessaires sur l’installation : le creuset devait être refait, les cowpers et les tuyères devaient être changés. Mittal a renoncé car cette technologie de captage stockage de CO2 représentait un investissement trop risqué dans la conjoncture actuelle. D’autant plus que la tonne de dioxyde de carbone s’échange à moins de six euros sur le marché, alors qu’elle devrait au moins atteindre une valeur dix fois plus élevée pour espérer rentabiliser une telle installation. Par ailleurs, l’Europe ne finance que le stockage sur dix ans à hauteur de 700 000 tonnes par an de CO2 enfouies et n’avance aucune aide au lancement du projet. C’est la raison pour laquelle le business modèle du captage stockage de CO2 reste encore beaucoup trop incertain pour un financier peu scrupuleux comme Mittal, soucieux de rentabilité à court terme pour éponger la très lourde dette de son groupe.
En retirant ULCOS du programme de financement de l’UE, ArcelorMittal a enfumé tout le monde et signé par la même occasion l’arrêt de mort de la filière liquide de Hayange-Florange. Cette décision unilatérale constitue un revers cinglant aussi bien pour le premier ministre, dont la gestion du dossier a été aussi calamiteuse que laminée, que pour le président de la république française. Il est difficile de croire que les vieilles rancœurs entre Ayrault et Montebourg n’ont pas pesé négativement dans la balance. Florange est devenu le Gandrange de François Hollande. Il est d’ailleurs grand temps que ce dernier se mette vraiment aux fourneaux s’il ne veut pas voir le dossier devenir pour lui un véritable chemin de croix.
En Lorraine, c’est la colère et l’incompréhension. A supposer que les soi-disant problèmes techniques soient résolus, que l’UE accepte encore de financer le projet et qu’il soit toujours possible de redémarrer les hauts-fourneaux après leur mise en sommeil, cela fait beaucoup trop d’éléments au conditionnel pour ne pas affirmer que la filière chaude de Hayange est bel et bien condamnée. Car une mise en sommeil si profonde n’est pas quelque chose d’anodin dans ce type d’industrie. Après une mise sous cocon, il est en effet nécessaire de tout refaire, ce qui représente des millions d’euros d’investissement.
La chronologie de destruction massive des installations prévue par Mittal suit donc son cours. L’accord avec le gouvernement français n’est qu’une mascarade de plus. Le grand gagnant, c’est Mittal. Preuve en est encore, le crédit d’impôt de dix millions d’euros sur un an qu’il vient d’obtenir de la France sans aucune contrepartie.
La Lorraine, les ouvriers d’Arcelor et les salariés des sous-traitants de la sidérurgie sont méprisés. Méprisés par le jeu machiavélique de la famille Mittal. Méprisés par les batailles de pouvoir dans les palais parisiens, alors que les sidérurgistes mosellans ont fait preuve d’un incroyable sang froid depuis le début de leur bras-de-fer avec le magnat indien. A travers leur drame, c’est toute une région qui voit son image à nouveau dégradée. Aucun ne se refuse à laisser mourir cette cathédrale d’acier après des mois et des mois de combat. Les fours à vent chaud doivent rester actifs pour éviter que le réfractaire en briques ne tombe et que tout l’ouvrage ne soit définitivement abîmé.
bloggerslorrainsengages
26 décembre, 2012 à 20:01
Dans le cadre du Projet ULCOS, le CO2 extrait des hauts-fourneaux serait enfoui en grande profondeur dans des zones de stockage souterraines d’une surface de 3 000 à 3 500 km². Celles-ci se situeraient à 70 % en Meuse, soit 2 000 à 2 500 km², le reste étant en Moselle et en Meurthe-et-Moselle. Les études géologiques ont désigné un triangle Verdun, côté champs de bataille, Etain et Fresnes-en-Woëvre.
Après le projet de centre d’enfouissement des déchets nucléaires à Bure dans le Sud du département (voir : http://blogerslorrainsengages.unblog.fr/dechets-nucleaires/), la Meuse voit d’un mauvais œil la perspective d’accueillir d’autres déchets dans son sous-sol.
Urgo
27 août, 2017 à 15:24
Non mais, il fallait arrêter cette farce. En greffant du neuf sur du vieux, il ne faut pas s’attendre à faire des miracles. Cette affaire était avant tout politique, à l’approche d’élections présidentielles, et la CFDT, alliée des socialistes menait le bal, avec comme « Maître de ballet », un certain Edouard Martin. Reconverti depuis en député européen, Madame Catherine Trautmann (ancien Maire de Strasbourg) ayant dû lui céder son siège, il est redevenu tout silencieux, et vit de ses rentes européennes.