Le château d’eau Saint-Charles de Vandœuvre-lès-Nancy a été reconverti en 1990 en tour d’habitation. 18 logements sociaux ont été créés de toutes pièces dans ce bâtiment circulaire haut de 35 mètres. Une prouesse architecturale, forcément devenue un véritable objet de curiosité. Quasiment aucun mur n’est parallèle à son vis-à-vis et aucun logement ne présente d’angle droit. De quoi déboussoler les inconditionnels de volumes rectangulaires.
Le château d’eau de Vandœuvre-lès-Nancy (Crédits photo : Alex@andrin)
Le cahier des charges imposait juste de préserver la structure en béton armé et de faire un minimum de modifications en façade. Les motifs en plein cintre et en attique furent conservés. Les décors originaux en briques de laitier et de terre cuite ont été replacés sur une façade préfabriquée en béton. Des celliers ont été installés au sommet, en lieu et place de la cuve de 1 000 mètres cubes qui constituait la raison d’être des lieux. Aujourd’hui, seuls une vieille vanne extraire des pompes qui fait office de poignée du hall d’entrée et un escalier hélicoïdal tournant autour des deux conduits d’amenée et de distribution de l’eau rappellent l’origine du bâtiment. Il est rarissime de pouvoir mener à bien ce genre de projet. Il ne doit en exister que trois ou quatre en France.
Le diamètre de la tour est de 17 mètres. Les dalles étaient espacées soit de 2,5 mètres, soit de plus de 5 mètres, ce qui a permis la création de niveaux intermédiaires et donc de duplex. Une cage d’ascenseur a pu être installée sans toucher à une seule poutre. Mais le principal défi consista à faire entrer la lumière dans l’édifice. Les rares ouvertures ont été reproduites à l’identique sur toute la façade, d’où les doubles baies vitrées qui vont du sol au plafond et qui offrent une vue époustouflante sur l’agglomération nancéienne.
Avant même d’entamer sa seconde vie, le château d’eau de Vandœuvre avait déjà marqué l’histoire lorraine de l’architecture. Il avait en effet été construit en 1908 selon un procédé d’avant-garde. Il s’agissait d’un des premiers bâtiments du XXème siècle en béton armé, selon la méthode Hennebique, du nom de l’ingénieur à l’origine du procédé. Sa construction avait également constitué un événement, puisqu’elle avait nécessité la mise en place d’une grue haute de 45 mètres. Du jamais vu à l’époque. Tout Nancy se déplaçait pour voir ce chantier.
Mais l’édifice avait perdu sa raison d’être dès les années 1950 avec la création de la nouvelle usine des eaux. Le monument a exposé pendant 30 ans sa silhouette triste et désœuvrée à toute l’agglomération. Personne n’osait raser ce phare familier et emblématique de l’architecture industrielle du début du XXème siècle. Plusieurs projets furent envisagés : restaurant panoramique, tour de télévision, musée de l’eau ou encore théâtre en rond dans la cuve. Aucun ne trouva le financement nécessaire. Jusqu’à la candidature de la SA HLM de l’Est. Cette dernière acquit le bâtiment en 1990 pour le franc symbolique à la Ville de Nancy, propriétaire des lieux, bien qu’il se situe sur le ban communal de Vandœuvre. Le château d’eau Saint-Charles était sauvé.
(Source : RL du 18/07/2012)