Nous avons dernièrement appris par la voix de son réalisateur lui-même, à savoir Gérald Olivieri, la création du film Mamie Yutz. Emouvant et tellement sincère. Gérald nous parle lui-même de son œuvre.
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Les BLE : Quelle est la genèse de votre film ?
Gérald Olivieri : Les plus belles vacances de ma vie, je les ai passées auprès de mes grands-parents, chaque été, dans une petite cité SNCF, en Moselle, dans le Pays des Trois Frontières. Un univers, un mode de vie différent, où tout me semblait meilleur, où tout me semblait merveilleux. Deux semaines après les noces d’or de mes grands-parents, mon grand-père décédait d’une attaque cardiaque dans la cabane du jardin. J’avais prévu de le filmer me parlant de son passé, notamment dans les camps de travail obligatoire à Munich. Cette mémoire m’échappait pour toujours, et je ne pouvais plus rien y faire. Alors que la maison se vendait, je découvrais des documents sur le passé de ma grand-mère dont je ne savais quasiment rien, si ce n’est qu’elle était orpheline. Je décidais alors de filmer mes souvenirs et ma grand-mère. Ma relation avec elle devenait différente car à travers son récit, une histoire et une culture s’offraient à moi. Elles ont changé la face de mon monde.
Les BLE : De quels sujets parlent votre film ?
G. O. : Le film est presque composé de deux parties. Après l’évocation de mes souvenirs d’enfance en Moselle, souvenirs comme on en a tous, le film parle de ma grand-mère que j’ai filmée sur plusieurs années. J’ai lu, écouté, recherché pour me rendre compte à quel point la Moselle avait souffert et souffrait encore de ces injustices et de cette absence de reconnaissance de ses souffrances. Cette double culture, linguistique notamment a été mal digérée. L’Histoire de la Moselle a été oubliée des livres d’histoire, elle est oubliée des médias qui parlent d’Alsace-Lorraine au lieu d’Alsace et de Moselle quand ils n’omettent pas tout simplement de citer la Moselle. Le film ne parle pas vraiment de ces problèmes mais il ouvre un peu plus une brèche dans laquelle on n’ose pas entrer. Des milliers de dossiers sont en attente de reconnaissance par les Etats français et allemand. De plus la langue de la Moselle du Nord va disparaitre car trop proche de la langue allemande, alors que bien plus ancienne.
Les BLE : Votre famille a donc été le témoin de tous ces troubles ?
G.O. : La mère de ma grand-mère a été déportée pour actes de résistance. Ma grand-mère sait simplement qu’elle a caché des prisonniers russes et surtout qu’elle a caché son fils, insoumis car il refusait l’incorporation de force dans l’armée allemande. En 2006 nous nous sommes rendus au Nord de Berlin à Ravensbrück. C’était la première fois, 62 ans après la mort de sa mère. Dans les registres, elle apparaissait comme allemande. Depuis, sa nationalité apparait comme française…
Merci beaucoup à Gérald Olivieri pour la réalisation de cette interview, pour sa confiance et son intérêt.